vendredi 26 février 2016

De l'Enfer au Paradis

13°00.155N 61°14.477W
Admiralty Bay, Béquia

Lorsque je suis arrivé dans la Baie de l'Amirauté, Admiralty Bay in english, je me suis ancré à environ 400 m de Margaret Beach. Pourquoi là ? Ben, c'est parce que je voulais être au plus près des copains de Good Life, c'est tout. Seulement, au bout d'une semaine à me faire ballotter dans tous les sens par des rafales de vent qui déboulent à toute berzingue de l'espèce de V formé par deux collines fort malheureusement disposées là, j'en ai eu marre. Mais alors, marre de chez marre. C'était pire qu'à Carriacou ! J'en avais marre à un point tel que j'étais à deux doigts de déclarer les Grenadines comme étant le pire endroit que La Boiteuse ait connu sous mon commandement. Une déclaration officielle, aussi définitive que lapidaire.

Le ponton
Alors je sais, on va encore dire que j’exagère, que je râle tout le temps, que je ne mérite pas la vie que j'ai, que je pourrais faire un effort quand même, que je ne suis qu'un aigri de Français jamais content de son sort, etc, etc...
Ouais, et alors ? C'est comme ça, faut vous y faire. Et si vous n'êtes pas jouasses, vous n'avez qu'à aller voir ailleurs. Le net regorge de blogs de voyage qui vous décrirons la carte postale exactement comme vous avez envie de la voir, et passerons judicieusement sous silence tout ce qui pourrait avoir un rapport avec la « vraie » vie. Leurs auteurs considèrent, à tord ou à raison, qu'ils sont des privilégiés. Bien, soit... Le souci c'est qu'ils considèrent également que parce qu'ils ont « la chance » de vivre votre rêve, ils ont le devoir absolu de ne pas vous le gâcher avec des considérations, qui en d'autres lieux et d'autres circonstances, vous sembleraient légitimes. C'est tout. (Non mais c'est vrai quoi, scrogneugneu !)

Et ici, à bord de La Boiteuse, nous ne mangeons pas de ce pain là. N'est-ce pas Touline ?

Exact ! D'ailleurs je ne mange pas de pain du tout !
Bien, ceci étant dit, et pour bien vous montrer que je suis quand même capable d'apprécier ce que je vis au jour le jour, revenons à nos moutons. Le mouillage était infernal, et je maudissais les Antilles. Cependant, alors que La Boiteuse tirait des bords sous les rafales, je reluquais avec curiosité, et mes jumelles, et un peu d'incrédulité aussi, les quelques bateaux mouillés au ras de la plage. Là où j'étais les haubans mugissaient, mais là-bas les drapeaux flottaient mollement ! Incredible but true 
Vue de la proue
J'ai donc profité d'une relative accalmie pour déménager. C'était samedi dernier... Sauf que, et là je vais vous la faire courte, une fois avoir levé l'ancre je me suis aperçu que le tourteau s'était encore une fois désolidarisé de l'inverseur. Oui je sais, c'est la troisième fois en six mois. Du coup, re-mouillage en urgence dans 10m de flotte. Démontage-changement de l'écrou-sertissage-remontage du bordel :Le tout en 90 minutes chrono ! Ouais je sais, même moi je suis impressionné.

Pas mal, non ?
Bref, depuis samedi dernier je suis enfin au paradis. Le bateau bouge à peine, la chaîne pendouille mollement à l'étrave, je peux compter les oursins qui tapissent le fond, et j'ai enfin chaud ! Depuis samedi, j'ai pris un rythme de vie plus en adéquation avec ma personnalité. Le matin de bonne heure, Touline et moi nous faisons le tour des copains, pile poil au bon moment pour se voir offrir le café. Puis, je me rend au GingerBread Hotel pour me connecter à Internet. Là-bas, même si le wifi est parfois erratique, personne ne vient vous faire chier pour vous obliger à consommer. Ce qui ne m'empêche pas de partager de temps en temps un excellent brownie avec mes copains les merles (de toute façon, si vous ne voulez pas partager, ces petits salopards sont capables de vous vider votre assiette le temps d'un regard distraitement jeté à une jolie fille qui passe par là).

GingerBread Hotel
Retour au bateau pour un petit frichti et une belle sieste. Ensuite, vers trois heures, je m'octroie une baignade. Petit tour au fond des eaux pour vérifier l'ancre (et celles des voisins), admirer les Grondins volants, les Rascasses (volantes elles aussi), les oursins avec des piquants de trente centimètres, les murènes, les poissons aux multiples épithètes, chirurgiens, trompettes, licornes, etc. Bref, je profite.
Je profite aussi de la vue. La plage est jolie, propre, et peu fréquentées. Quelques English Old Ladies prennent le soleil, mais j'ai aussi la chance d'apercevoir parfois de belles jeunes filles se baigner... Bon, pour l'instant aucune n'a daigné nager jusqu'au bateau pour faire ma connaissance, mais je ne désespère pas que cela arrive un jour !

Allez, je vous laisse avec quelques vues depuis le pont de La Boiteuse !

 
Enfants
 
Touline tranquillou
Pleine lune
Boutique en plein air

14 commentaires:

Sophie L a dit…

J'aime bien quand tu râles. Mais ça fait quand même plaisir de te voir content (surtout que vu que tu n'hésites pas à râler quand tu n'es pas content, si tu dis que tu es content, c'est que tu es vraiment content!). Profite bien de ton paradis, tu ne l'as pas volé.

hedilya a dit…

P****n je rêve même des haubans hurleurs...

Gwendal Denis a dit…

@Sophie : J'essaye d'être honnête intellectuellement. Envers moi-même d'abord, puis envers vous... Je trouve que c'est un minimum pour se tenir debout et la tête droite.

@Hedilya : Nan, nan, nan... Je t'assure quand de ce cas-là, c'est un cauchemar, pas un rêve !

Monique a dit…

Ben tu vois que le paradis n'était qu'à quelques encablures ...

Faut jamais désespérer et regarder juste un peu plus loin.

Râle, râle autant que tu veux mais n'oublie pas ta longue vue !

Des bisous, mon Gwen !!!

Anonyme a dit…

Dire qu'à partir de Portimao j'ai mis deux clefs qui vont bien dans un tiroir à coté du local machine, et qu'avant chaque appareillage je donne un tour de clef sur tous les écrous de l'accouplement... je comprends ce que ça fait, après avoir vécu l'arbre qui s'en va et qui plante l'hélice dans le safran, les écrous qui font "clang clang clang" en tapant dans l'accouplement, des misères dans la vie d'un navigateur qui a besoin de croire en sa monture. Bien content que t'aies trouvé un coin de paradis, je commençais a avoir l'impression que les Antilles version "mouillage de rêve" n’existaient que dans l'imagination d'Annie van de Wiele. Et je parle d'un bouquin qui date de l'année 1965...

Gwendal Denis a dit…

@Monique : Disons que "De l'Enfer au paradis" est plus une licence littéraire qu'une réalité. C'est comme le jour et la nuit !
J'ai quand même hâte de me retrouver dans une marina...

@Gubragh : J'ai lu ! Et effectivement c'était il y a cinquante ans. Depuis, les choses ont changées... Et pas en bien !

Guerdy a dit…

Bonjour Gwendal, moi aussi je suis très content que tu ai fini par trouver un endroit agréable.
Les navs' sont toujours assez dures surtout en solo, alors il est nécessaire d'avoir une "alegranza" au bout.
Et comme dit Gubragh << il faut toujours resserrer les boulons>>
En souhaitant que la vie n'est pas trop cher à Admiralty Bay, Béquia ?

Hasta luego y buena suerte

Guerdy

guerdy a dit…

C'est encore moi,

Pour attirer une belle naïade fais résonner de la musique "suave" dans le cockpit mets-toi du patchouli
Hi-hi

Guerdy

Gwendal Denis a dit…

@Guerdy : La vie courante n'est pas donnée, c'est vrai. Mais j'essaye de faire attention. Sinon, Pour les naïades, j'ai tout essayé : La musique, les odeurs de bouffe, et même mes billets de banque épinglés à la filière ! Rien de marche ! Faut peut-être que j'arrête de me balader à poil sur le pont aussi... :)

Anonyme a dit…

salut

utilises un frein filet (moyen dans la gamme de resistance) pour ton tourteau

bonne continuation

serge

Gwendal Denis a dit…

@Serge : C'est fait, bien évidemment :)

Jissé de Carriacou a dit…

quand je pense que je t'ai conseillé par 3 fois d'aller à l'endroit exact où tu es maintenant...mais..... tu voulais absolument aller en face...!!!
bref...suis bien content que tu apprécies cette île et que tu y sois bien
salutations

Unknown a dit…

Bonjour Denis,

J’ai découvert ton blog, c’est beaucoup d’écritures et de lecture à dévorer, surtout que j’ai fait le choix de changer de vie, d’habiter sur mon bateau et de parcourir les mers.
Je parle de moins en moins de tour du monde, cela implique un éventuel retour, donc j’écarte cette idée.
Nous avions néanmoins un trajet avec encore des lieux prédéfinis et un timing, des restes de l’ancienne vie.
Les choses ne se passent pas comme prévu, désormais nous commençons à prendre le temps en fonction de différents facteurs et dans ce domaine tu as une sacrée expérience.
Nous sommes actuellement à Gran Canaria et allons partir sur le Sénégal livrer du matériel dentaire et scolaire
J’espère simplement aller un peu plus vite que toi pour avoir la chance de te rencontrer.
Voici le lien de notre blog ou le tien occupe la première place d’une future liste : http://alizesalizes.blogspot.com
Profite bien du paradis

Amicalement
Francis et Jamila

Gwendal Denis a dit…

@Jissé : Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Tu avais raison !

@Francis et Jamila : Je serais ravi de partager avec vous ma petite expérience. je vous attends au Marin !