lundi 17 décembre 2018

La Dernière Nave – Partie 1

15° 39,685' N 89° 00,194' W
Marina Manglar del Rio, Guatemala

Le lundi 26 novembre 2018

12H40 : Je vais être franc avec vous, cela n'a rien d'évident de reprendre l'écriture après un si long moment. C'est comme une douce souffrance, à mi-chemin entre le plaisir de retrouver ce sentiment de total abandon, de mise à nu, et la douleur de ne pas savoir comment tout dire.
Il y aurait tant à dire sur ces presque trois ans d’escale en Martinique... J'avais commencé d'ailleurs, puis hélas le courage m'a manqué pour aller plus loin. Mais bon, peut-être serait-il mieux de taire tout cela et de passer directement à ce qui m'amène de nouveau à me faire chahuter dans le cockpit de mon bateau, le cahier sur les genoux et stylo à la main ?

Bye-bye Le Marin !
Ce samedi, La Boiteuse a enfin viré son cul étroit de la Baie des Cyclones. Mon pote Jean-Lou nous a accompagné et ensemble nous avons emprunté la Passe des Fous, située entre le fameux Rocher du Diamant et la pointe du même nom, pour rejoindre les Anses d'Arlet. Un galop d'essai du douzaine de milles histoire de balayer quelques doutes qui subsistaient dans mon esprit. Enfin, des doutes... Disons que j'avais quelques inquiétudes. Comment est-ce que mon corps de cinquante-et-un ans allait encaisser de se retrouver en grande navigation après une si longue pause par exemple. Ou bien comment La Boiteuse allaient elle se comporter, pour les mêmes raison d'ailleurs. Ou encore, comment Zika allait elle vivre ça ? Bref, j'avais besoin d'être rassuré.
 
Le Rocher du Diamant

Pour faire court, ces trois points ont été validés avec le satisfecit du jury. J'ai eu mal partout, mais ça je m'y attendais un peu, et j'ai perdu un cran de ceinture en une journée (record personnel il me semble) ! Le bateau a juste perdu son support de pilote automatique, que j'ai réparé illico (que Dieu bénisse l'inventeur de la perceuse sans fil ! Ou plutôt, qu'il me bénisse MOI pour avoir pensé à en acheter une il y a quelques mois ! ). Et enfin, Zika a été exemplaire ! Bon ok, il va falloir qu'elle travaille un peu son équilibre, mais je ne doute pas qu'elle va s'y faire. Pour l'instant, elle a trouvé sa place pour se prémunir du roulis. J'imagine qu'elle a dû prendre exemple sur Touline, la chatte des mer, qui a quand même quelques 12 000 milles à son compteur s'il vous plaît !
Bref, tout ça c'est à peu-près bien passé, et c'est le cœur un peu plus léger que j'ai pu enfin dire adieu à la Martinique. 


Donc, à 09H40 ce matin, La Boiteuse a relevé son ancre et c'est le cœur léger que nous avons pris la direction du large. Franchement, décider de s'arrêter une journée aux Anses d'Arlet était une bonne idée. Ne serait-ce que parce que c'est un endroit magnifique visuellement, mais surtout parce que c'est un endroit invivable pour moi ! Bruyant, rouleur, des locaux pas sympas... Bref, un endroit bien pourri selon mes critères bien sûr, qui ne m'a donné envie que d'une chose : me barrer le plus vite possible !

Les Anses d'Arlet
14H40 : Le vent a viré un peu et je suis obligé de passer les voiles en ciseau pour ne pas perdre trop de cap. La Boiteuse est maintenant à 170° du vent, bâbord amure et roule comme une barrique. J’aperçois bien la Montagne Pelée et son sommet ennuagé.

15H10 : J'ai faim ! J'ai sauté le repas de midi, mais il est encore un peu tôt pour attaquer la popote. Une tasse de café peut-être ?
Le vent baisse un peu en intensité, et la mer (il me semble) paraît moins agitée. Ce qui est sûr c'est que le cockpit de mon bateau ressemble moins à une lessiveuse !
Le vent... Une des raisons qui m'ont fait choisir le Guatemala comme destination, parmi d'autres dont je vous parlerais certainement plus tard (on a le temps non ?), c'est que là où je vais il n'y a pas de vent. Du moins, pratiquement pas.
Je sais, vous allez me dire : Mais alors il doit faire chaud !!! Oui, mais je m'en tape. Ça vous va comme réponse ? Je suis un individu tropicalisé moi ! A mon thermomètre personnel, en dessous de 25° il fait froid, et il commence à faire chaud au dessus de 35°. Entre les deux, c'est parfait.
De toute façon, tout vaut mieux que ces fichus alizés qui m'auront bien pourris la vie pendant ces presque trois ans. Sérieux ? Vous avez déjà vécu dans un endroit où il y a en permanence entre 20 et 30 Km/h de vent ? Non mais allô quoi ! C'est proprement invivable ! Ça fait de l'air qu'ils disent... J't'en foutrais moi de l'air ! Je ne supporte pas les courants d'air !
Bon ok, je caricature un brin, je le confesse. Quand je dis, en permanence, j'exagère. Il peut y avoir de temps en temps de belles journées en Martinique. Des journées sans vent, bien chaudes, plutôt en été pendant la saison cyclonique d'ailleurs... Mais cela doit représenter en tout et pour tout un mois par an, pas plus. Pour être tout à fait sérieux, j'en suis venu à un point ou le vent m'insupporte physiquement. Ça me vrille les nerfs. Le bruit du vent dans les haubans, le bruit du clapot, le claquement des drapeaux, l'annexe qui tape... Tout ça me rend nerveux à un point qu'il est difficile de décrire. Mes amis du Marin vous le dirons, les jours de vent , même modéré, je ne suis pas à prendre avec des pincettes. Je deviens invivable. Et les jours de grand calme, j'ai l'impression de sortir d'un espèce de tunnel sonore, je revis.
Donc voilà, Guatemala pas de vent et même si cela signifie deux fois plus de pluie, je m'en fout.

Apprentissage du calage
15H40 : Puisqu'on parle météo, deux mots sur ce qui nous attend pendant cette traversée. Je n'ai pas pu reprendre les gribs aux Anses d'Arlet faute de connexion internet (ne vous avais-je pas dit que c'était un endroit pourri ?), mais je pense que les choses n'ont pas beaucoup évoluées depuis samedi. A savoir, normalement de 15 à 20 Nœuds de secteur Est jusqu'à la Jamaïque, pour ensuite virer Nord-Est jusqu'aux Îles du Honduras. Pour finir, il faudra bien que La Boiteuse se débrouille avec les quelques thermiques qu'elle rencontrera. Arrivée prévue autour du 11 décembre.

16H20 : Je viens de réaliser que lorsque j'ai hissé la Grand Voile ce matin avant de partir, je pensais prendre un ris par sécurité, et en fait j'en ai pris deux... Pas étonnant qu'on se traîne ! Un acte manqué vous croyez ?
Bon, la question qui se pose maintenant est celle-ci : Est-ce que je relâche ce ris pour regagner un peu de vitesse, ou bien est-ce que je laisse les choses en l'état ?
Réflexion faite, la nuit sera là dans moins de deux heures, alors mieux vaut être prudent. Donc ça va rester comme ça.

16H40 : Ben voilà ! Quelqu'un, quelque-part loin derrière, vient de rallumer le ventilateur ! 5 Nds ! Bon d'accord, du coup la mer se re-creuse et on re-roule de plus belle... Il va bien falloir que je m'y habitue, parce qu'en théorie, ça va être comme ça pendant encore au moins dix jours !


17H30 : Le soleil est en train de se coucher. C'est drôle... Certains considèrent que les couchers de soleil sur la mer sont des moments privilégiés, mais pas moi. Je préfère et de loin les levers de soleil. C'est un truc qui vient de loin... De ma période militaire en fait. Quand j'étais Fusilier Commando, j'effectuais souvent les patrouilles de deux à sept heures du matin, et de voir le jour poindre, puis le soleil se lever, cela signifiait que la garde se terminait (My watch is ended !). Mais je crois aussi que cela peut venir de plus loin encore. De la partie la plus ancienne de mon cerveau, celle qui comporte les souvenirs du temps où nous n'étions que des singes à peine plus évolués que les autres, et que pour nous la nuit représentait le danger. Le moment où les monstres sortaient...

Je donne à manger aux bêtes. Touline a plutôt envie d'aller se balader sur le pont pour voir si par hasard un poisson volant suicidaire ne s'y serait pas échoué. Quant à Zika, elle avale ses croquettes comme si sa vie en dépendait. Brave chienne... Je dois avouer qu'elle m'épate un peu sur ce coup-là.

18H00 : Allez on ferme ! Tout le monde à l'intérieur et moi dans le cockpit. 
Premier soir...


Le mardi 27 novembre 2018

06H00 : La première nuit a été, comment dire, un peu agitée. Au sens propre comme au sens figuré. Tout d'abord, contrairement à mes espérances, le vent ne s'est pas calmé. Il a même forcit, et la mer s'est creusée un peu plus jusqu'à ce que les vagues commencent à déferler. Ça a été comme ça toute la nuit, et ça continue encore.
Malgré ça, La Boiteuse a maintenu son cap au 280° à une vitesse moyenne de 4,7 Nœuds, ce qui est plutôt pas mal compte tenu de l'état de la mer, des deux ris pris dans la GV et du foc (ma mule comme je l'appelle) réduit de moitié.
Au début, Zika n'a pas trop apprécié de rester enfermée alors je l'ai prise avec moi dans le cockpit. Sauf qu'il n'y a pas vraiment de place pour deux dans ce cockpit ! Je peux juste m'y recroquevillé sans pouvoir allonger les jambes ! Bref, je l'ai gardé une heure contre moi pour la rassurer, puis je l'ai faite rentrer. Et là, j'ai pu enfin dormir...
Ce matin, tout semble aller bien. Elle est même allé faire son pipi sur le passe-avant de sa propre initiative. Brave fille. Et Touline me direz-vous. Je la regarde en ce moment, prête à bondir. Elle n'attend qu'une chose, que je détourne les yeux pour se barrer explorer le pont... Qu'elle roublarde celle-la. Hop, la voilà partie ! Et deux petits exocets pour Touline, deux !

07H20 : Au fait, bien évidement la Martinique a complètement disparu de l'horizon. C'est la pleine mer. Il n'empêche, j'aimerais bien qu'elle se calme un peu la pleine mer... Je me fous complètement d'arriver un jour plus tôt si c'est pour être ballotté comme ça.

07H30 : J'aperçois quelques traînées de sargasses. Merdum, il va falloir que je surveille la pâle immergée du régulateur et que je me tienne prêt à la dégager si jamais ces saloperies venaient à se prendre dedans...

08H15 : Ça a l'air de se calmer un peu... Tant mieux. Vous savez, ces presque trois ans de pause en Martinique m'auront permis également de réaliser que naviguer ce n'était vraiment pas mon truc. Enfin, je m'en doutais un peu pour tout vous dire. Cela fait des années que je navigue, je sais le faire, et je me débrouille plutôt bien (je pense) lorsque j'y suis obligé, mais je ne ressens aucun plaisir à le faire... Vraiment aucun. Ça me gonfle, c'est tout. Comme une corvée de chiotte.
On m'a fait souvent le reproche d'être resté trois ans ancré quasiment au même endroit, de ne pas avoir visité d'autres endroits, d'autres îles. Mais pourquoi faire franchement ? Je ne « visite » pas les endroits, j'y habite, c'est carrément différent ! Je n'ai rien d'un touriste merde à la fin !
Du coup, je me rends compte que je suis en train de remettre en question les fameuses paroles du sage qui disait un truc du genre : L'important n'est pas la destination, c'est le chemin.
Mmmmouais... T'es sûr de ton truc mon bonhomme ? Non parce que j'y ai cru à ton histoire de chemin, et pendant des années même. Et bien je peux te dire que selon mon expérience, ton précepte c'est de la connerie en barre ! L'important c'est de trouver un endroit où on se sente bien, et c'est déjà un sacré boulot crois-moi, parce que des endroits comme ça il n'y a en a pas tant que ça !
Je vais au Guatemala parce que j'ai choisi cet endroit, et avec l'intention d'y passer si possible, le reste de ma vie. Et si pour cela je dois me taper quinze jours de mer et bien tant pis et allons-y. Plus vite ce sera fait, plus vite se sera terminé !
Que n'ai-je entendu lorsque j'ai annoncé que je comptais faire la route d'une traite.... Mais pourquoi ne t'arrêtes tu pas en cours de route ? Il y a plein d'escales super ! Que nenni ! Si j'ai réussi à bouger mon cul, c'est avec la seule et unique motivation d'émigrer au Guatemala. J'en ai rien à branler d’Haïti, ou de la Jamaïque. En plus, sérieusement, selon mes critères Haïti et la Jamaïque sont des escales de merde... Mais bon, chacun ses goûts hein ?

10H35 : J'ai faim... Ce qui est plutôt normal étant donné que mon dernier repas date de dimanche soir. Avant de partir j'ai commandé une miche de un kilo à la boulangerie de la Marina. Je vais donc me faire quelques tartines avec du beurre... Sans oublier de partager ça avec Zika, car c'est probablement sa friandise préférée ! (Tel chien tel maître dit-on).
Tien, voilà une chose qui va probablement me manquer lorsque je serais là-bas ; ma baguette fraîche journalière... Mais bon, j'imagine qu'il y aura là-bas quelques compensations. J'avoue n'être pas très au fait de la cuisine d'Amérique Centrale, mais j'ai le sentiment que ça va me plaire.

12H00 : On avance bien ! 5,3 Nœuds sur les dernières six heures ! Avec une mer plus calme (F4) et de moitié de voiles, c'est pas si mal ! 115, 7 Milles parcourus en 24 heures. Je suis content !

14H40 : J'ai obligé Zika à descendre à l'intérieur afin que je puisse dormir un peu. En attendant de trouver le sommeil, je réfléchissais à une autre des raisons qui m'ont décidé à partir. Pendant ma période martiniquaise j'ai entrepris de faire le tri entre ce que je voulais de la vie, ce que croyais vouloir et ce que j'avais cru jusqu'alors mais ne voulais plus. Après cinq années à parcourir le monde, j'avais vraiment besoin de faire ce travail d'introspection. J'avais l'impression d'aller droit dans le mur, que mes motivations premières n'étaient plus très claires... Bref, c'était plus que nécessaire.
Naviguer sans but précis à la recherche d'un hypothétique bonheur ? Je crois que c'est bon, j'ai fait le tour de la question et cela ne marche pas. Les femmes ? Ah les femmes... Depuis Zoë, je suis sorti avec trois autres femmes et je me suis finalement rendu compte qu'au fond de moi c'était trop tard, je n'y croyais plus. Je n'ai tout simplement plus envie de faire les efforts nécessaires pour établir une relation durable et encore moins pour construire une famille... Zoë restera mon dernière amour et c'est très bien comme ça.
Maintenant que j'y pense, si ça a foiré entre nous c'est peut-être parce que, déjà à l'époque je n'étais déjà plus capable de faire les efforts nécessaires... Mais il y a cinq ans, je croyais encore à cette injonction culturelle ; Femme parfaite tu rencontreras, et Famille tu engendreras !
Mouais... J'y ai vraiment cru à cette histoire de conte de fée... J'y ai cru passionnément. Et j’admets que peut-être une petite partie de moi, bien planquée au fond de mon cœur, y croit encore. Mais pour le reste, c'est foutu.

Tout ça pour dire qu'actuellement je n'aspire qu'à reproduire le mode de vie que j'ai découvert au Marin et qui me convient si bien : Vivre sur mon bateau avec mes bêtes, dans un endroit sûr et protégé (voire même privilégié, j'ai passé l'âge d'avoir ce genre de scrupules). Avoir une petite vie peinarde avec mes petites habitudes. Avoir des copains et pouvoir les voir uniquement quand ça me chante. Être utile en rendant des services quand je peux, mais sans que cela ne bouleverse trop mon petit train-train. Bref, une petite vie tranquille sans faire chier personne et sans que personne ne me fasse chier.
Le problème, c'est qu'au Marin il y a trois soucis majeurs pour moi. Le vent, je vous en ai déjà parlé, les cyclones qui même quand ils ne vous touchent pas vous filent des sueurs froides, et enfin le coût prohibitif de la vie en général.
J'ai cinquante-et-un ans, et je n'ai absolument aucune envie de retravailler. Il me reste encore un peu d'argent, et cet argent doit durer le plus possible, au moins jusqu'à l'âge de la retraite. Donc, l'immigration s'impose d'elle-même comme une évidence. Je dirais même que ce fut une décision pragmatique. Comme quoi, tout arrive.
Après avoir étudier le sujet, en long en large et en travers, le seul pays pas trop loin de la Caraïbe qui soit à la fois safe d'un point de vue météo, suffisamment développé ou du moins être à même de pouvoir satisfaire les exigences d'un individu occidental moyen, et dont le coût de la vie soit trois à quatre fois moins élevé qu'en Martinique, le seul pays c'est le Guatemala. Et plus précisément, le Rio Dulce.

15H20 : Il y a une chose aussi dont je voulais vous parler. Vous vous souvenez peut-être que lorsque je suis arrivé au Marin j'ai pris ce que j'ai appelé unegrande claque dans la gueule. A savoir, que du statu de Capitan Frances, je suis devenu un quidam parmi tant d'autres et qu'au début en tous cas, cela m'a fichu le moral à zéro.
Et bien trois ans plus tard, force m'est de constater que je m'en suis remis sans même m'en apercevoir. Et ce sont précisément ces derniers jours passés au Marin qui me l'ont fait réaliser. Comment vous dire ça sans paraître trop présomptueux... Au fil du temps, à force justement de routine et de petits services, j'ai acquis une espèce de petite réputation. Oh, pas la réputation que je rêvais d'avoir au début de mon voyage non (Grand Ecrivain-Voyageur, autodidacte tout ça...), mais la réputation d'un type honnête sur lequel on pouvait compter, qui est là depuis longtemps et qui sait des choses. Une référence, un pilier de la communauté comme ils disent dans les séries américaines.
J'ai presque honte d'écrire ça... Sérieusement, jamais je n'aurais pu imaginer écrire un truc pareil si cela ne m'avait pas été maintes fois répété juste avant que je m'en aille. Je n'en avais pas vraiment conscience, mais en fait les gens à force de me côtoyer me respectaient pour qui j'étais, et non pas pour qui j'étais sensé être... Alors d'accord, cela ne s'est pas fait du jours au lendemain, c'est un processus qui demande du temps. Mais déjà de savoir que cela est possible me donne une grande confiance en moi. C'est bien pour ça que je ne m'inquiète pas vraiment de la façon dont cela se passera au Rio Dulce. Si j'ai été capable, sans m'en rendre compte je le répète, de me construire une petite vie sympa juste en étant moi-même, et bien je peux le refaire.

16H00 : Au fait, il fait un temps splendide. La mer est belle, presque calme. J'ai déroulé un quart de la mule et on trace notre chemin à presque 5 Nds sans être trop ballotté. C'est parfait.

16H40 : Si seulement cette navigation pouvait être comme ça jusqu'à la fin... Tranquille et efficace. Mais hélas, j'ai un peu trop d'expérience pour savoir qu'il ne faut pas trop espérer en haute mer. On prend ce qu'on nous donne, et quoi qu'il arrive on essaye de faire avec.
Cela dit, j'envisage de me mettre à cuisiner avant que la nuit ne tombe. J'ai presque un kilo de poulet mariné qui m'attend dans le frigo, et cela serait bien dommage de devoir le refiler au poisson !

18H15 : Je me suis régalé ! Ça fait du bien de pouvoir avaler enfin un repas chaud. Du coup, tout le monde a mangé, et nous nous attardons un peu dans le cockpit. C'était une belle journée, alors en bon Capitaine j'ai décidé d'accorder quartier libre à mon équipage.
Zika vient de comprendre quelque chose d'important. Tout à l'heure elle m'a accompagné sur le pont et s'est juchée sur le roof en faisant un 360°, les yeux fixés sur l'horizon... Puis elle est venu se réfugier auprès de moi en pressant sa tête contre mon épaule. Je pense que Zika vient de réaliser que la terre avait bel et bien disparue !

Le mercredi 28 novembre 2018

06H40 : La nuit s'est bien passée. 50 Milles de plus au 280°. Ça ne casse pas trois pattes à un canard, mais ça fait quand même le job.
Hier au soir vers 23H30, Zika m'a fait un peu chier pour que je la laisse sortir. Je pensais que comme la veille elle avait juste envie que je la prenne avec moi, alors j'ai fait la sourde oreille pendant longtemps avant de finalement craquer. Aussitôt, elle s'est faufilée sur le pont pour faire ses besoins, la petite et la grande commission ! Je l'ai félicité à grand renfort de caresses et de bisous.
Sinon, RAS... Ah si, une chose ! Avant, lors de mes précédentes navigations je me réveillais à peu près toutes les heures pour vérifier l'horizon. Maintenant je m'aperçois que je dors par plage de deux heures à deux heures et demi... Ce n'est pas l'idéal pour la sécurité j'en conviens, mais après tout c'est la pleine mer, et pour l'instant je n'ai croisé que des cargos. Et ceux-la, mon Mer-Veille me les signale bien avant que je ne les vois.

07H10 : Ceux qui connaissent un peu la navigation en mer des Caraïbes, savent que depuis quelques années on assiste à une recrudescence d'attaques de voiliers en mer au large du Honduras. Oh, on ne peut pas vraiment appeler ça de la piraterie... Disons plutôt des vols ou des tentatives de vol, avec ou sans armes, perpétrées par quelques pêcheurs frustrés. Une demi-douzaine d'incidents de ce genre ont eu lieu ces trois dernières années. Pas de quoi fouetter un chat, mais tout de même suffisamment inquiétant pur justifier un petit détour.
Aussi ai-je choisi de passer bien au large du plateau continental hondurien, histoire de ne pas tenter le diable. Et si par malheur diable il y avait malgré tout... Et bien il aurait quelques difficultés à s'emparer de mon bateau, croyez-moi.

Quant à la sécurité dans le Rio Dulce, à part quelques vols d'annexes il semblerait qu'il n'y ait pas de souci à se faire. Ce petit coin de paradis s'est développé grâce au voiliers américains et j'imagine que les gens du coin n'ont pas vraiment envie de mordre la main qui les nourrit. Le fait est que d'après tout ce que j'ai pu lire, les gens qui font escale là-bas ne craignent quasiment rien.

08H30 : Il fait un temps splendide, un petit F4 venant de l'Est, 4,5 Nds à 150° du vent... Parfait ! Je savais que cette fenêtre météo s'annonçait presque idéale. C'est d'ailleurs ce qui m'a botté les fesses, parce que bientôt vont débarquer les vents de Noël avec leur cortège de pluies et de bourrasques. C'était The moment ou jamais pour partir. Et puis je ne voulais pas que ce qu'il s'est passé en juin se reproduise, prévoir de partir, arrêter une date et finalement devoir renoncer faute de fenêtre météo satisfaisante. Et accessoirement se taper une troisième saison cyclonique.
Mon plan initial était de partir le 15 novembre, et je suis finalement parti le 26. Ce n'est pas si mal après tout.

09H35 : Ben merde alors ! J'étais en train de ranger un truc lorsque j'entends un bruit sur le roof au dessus de la tête. Un coup d’œil dans le cockpit, merde Zika n'est plus là ! Je sors, et je vois madame allongée de tout sont long au pied du mât, les pattes bien calées avec le hale-bas ! Elle a l'air bien là... Mais je flippe quand même un peu parce qu'il suffit d'une vague un peu plus haute que les autres pour que... Bon allez, c'est bien mignon tout ça, mais si Touline n'a pas le droit de sortir du cockpit sans surveillance, toi non-plus ! Zou, à l'intérieur !
Je sais que je n'arrête pas de le dire, mais elle m'épate cette chienne.

11H00 : On se traîne un peu là... 3 Nœuds, ce n'est vraiment pas beaucoup compte tenu du vent et de la mer. Un courant contraire peut-être ? J'ai décidé de me mettre à 140° du vent (l'angle optimal au portant) dans l'espoir que ce l'on perdra en cap, on le gagnera en vitesse.

11H20 : Bon ben ça ne marche pas des masses cette histoire... Peut-être serait-il judicieux de larguer un ris ? Mouais, sans doute. En tous cas ce serait conseillé si j'avais un rendez-vous important avant la fin de la journée, c'est sûr. Mais ce n'est pas le cas, donc on va laisser les choses en l'état et profiter un peu de cette accalmie. Je vais faire cuire le poulet qu'il me reste, comme ça il se conservera plus longtemps.

12H00 : Bon... 3,8 Nds ces dernières six heures, ce n'est pas vraiment top. En plus j'ai perdu 20° en cap. Bien, d'abord manger, ensuite aviser.

12H40 : Je viens d'abattre de 40° pour mettre le bateau au vent arrière voile en ciseaux. On verra bien ce que cela donne.Pour l'instant on avance aussi lentement, mais au moins le cap est bon. Pile au 275°.

13H00 : Putain ça fait chier. Le vent est en train de virer au sud-est. Il va falloir que je change le tangon d'amure... C'est quoi ce binz ? Il n'y a absolument aucun nuage dans le ciel et le baromètre est à 1012 Hp depuis ce matin.

13H15 : J'ai relâché le ris n°2. On n'avance pas plus vite (si, juste un poil), mais le bateau est plus stable et le cap est meilleur. C'est déjà ça de gagné. Wahou ! Un surf à 3,4 Nds !!!! Ah non pardon, j'ai mal lu, c'était 2,4...

13H45 : Bon écoutez, on va laisser les choses comme ça parce que je ne me sent vraiment pas le courage de me lancer dans l'installation du Spi. En plus il fait une de ces chaleurs... Autant rester à l'ombre et attendre que ça passe. On est au 2ème jour sur 15 ou 16, ça nous laisse largement le temps de rattraper le coup. On est pas des plaisancier merde !

15H25 : Je bouquine, mais de temps en temps je jette un œil à l'arrière guettant un frisottis, une moustache, un signe quelconque que le vent est en train de revenir. Quedalle. J'ai connu pire comme pétole, on va dire que celle-la est molle. Une pétole molle.

16H30 : Pour m'occuper je fais et refais des calculs dans ma tête. Normalement si la route est parfaite, sans zigzags intempestifs, si on avance à 4,5 Nds de moyenne (c'est ce que l'ai prévu dans mon plan de nave), on va mettre 15 jours. A 4 Nds on mettra 17 Jours. Et enfin si on va à 3,5 Nds (moyenne de ma transat en 2012), on mettra 19,5 jours !
Ce qui veut dire que même avec un moyenne de merde, j'arriverai à temps avant que mes référents à terre (coucou Jean-Lou, coucou Monique !) ne s'inquiètent.
Je le répète, si la route est parfaite. Ce que je sais être absolument impossible ! Mais rendez-vous compte tout de même. Un Nœud en moins, et cela représente cinq jours de retard!Vous comprenez pourquoi j'apporte une attention toute particulière à ces fichues moyennes ?

17H45 : Le soleil se couche, il est temps de remettre ma vieille polaire toute élimée qui me tient chaud en mer depuis bientôt huit ans. Car oui messieurs-dames, j'ai froid.

18H30 : Comme je m'en doutais, cet après-midi n'a pas été des plus fameux. 16,2 Milles de parcourus en six heures, ça fait une moyenne de 2,7 et ça fait descendre ma moyenne générale à 4,9 (les chiffres... Je sais que ça vous gonfle mais c'est important). Mais bon, ce sont les aléas de la mer n'est-ce pas ?
Tout le monde a dîné et on s'apprête à refermer les panneaux. Une fois bien sûr que j'aurais récupéré Touline qui vient de filer sur le pont. Elle croie que parce que je suis en train d'écrire je ne la vois pas la garce...

18H45 : Nom de Dieu de Bordel de Merde ! Tentative de mutinerie sur La Boiteuse ! Zika voyant que sa copine Touline refusait de se laisser enfermer a décidé de se montrer solidaire de sa camarade et l'a rejoint dans son mouvement de protestation ! J'ai dû courir après les deux pendant dix minutes ! Je vous prie de croire qu'après avoir réussi à enfin les coincer, je les ai balancé sans ménagement à l'intérieur. Allez zou, à fond de cale les rebelles ! Non mais des fois, c'est qui le Capitaine ici, hein ?

Le jeudi 29 novembre 2018

06H15 : Je sens que ça va être une journée de merde... Je n'ai pas dormi plus de cinq heures cette nuit. Ver 01H30 il a plu (un peu), et vers 03H30 mon Mer-Veille a sonné pour me signaler un bateau. J'ai raté le point de six heures bien sûr, et griotte sur le clafoutis je suis tombé en panne de gaz. Et vous savez quoi ? La nouvelle bouteille ne marche pas ! Ajoutez à ça la débandade de l'équipage sitôt les panneaux enlevés... Donc là, excusez-moi, mais il faut que je me calme un peu.

06H45 : Ouf ! Ce n'était que le gicleur de la gazinière qui était bouché ! N'empêche, j'ai eu peur un instant que la bouteille soit défectueuse comme cela m'est déjà arrivé une fois au Marin... Si cela avait été le cas nous aurions été dans la merde parce que je n'en ai pas d'autres !

07H15 : J'ai remis La Boiteuse en ordre de marche après avoir fait le point, et comme je m'en doutais ce n'est pas fameux. Pas le bon cap, pas la bonne vitesse... Bref, j'ai lofé de 20°, repassé la GV sur bâbord, et on va essayer de rattraper tout ça.

07H40 : Jusqu'à présent, les sargasses étaient présentes mais de manière dispersée. Là, elles commencent à se regrouper en petits bancs compacts. Je sens que mon régulateur ne va pas aimer ça...

08H30 : Nous voilà à 140° du vent, tribord amure. Cap au 280°. La Boiteuse n'avance pas forcément plus vite mais au moins on va dans le bon sens.

10H00 : Bon ben je crois qu'on peut désormais dire que les besoins de Zika sur le pont sont une chose acquise ! Elle y va d'elle-même, fait ce qu'elle a à faire, et revient aussitôt après dans le cockpit.

12H10 : On avance plutôt bien. 4,5 Nœuds ces dernières cinq heures au 270°. Je peux même me permettre de lofer de 5°... Ok, ça c'est fait. Un petit tour d'horizon pour la forme... Rien A Signaler. Le souci c'est qu'à présent j'ai une petite faim... Mais que je n'ai absolument aucune envie de me faire à manger. Rhoooo.... Je sais ! Des cookies au chocolat, trempés dans une tasse de café ! Voilà une idée qu'elle est bonne !

13H50 : C'est quand même génial la technologie non ? Maintenant, si je veux savoir où je suis et si ma route est bonne, je n'ai même plus à lever mon cul de mon banc. J'allume mon téléphone et hop ! En un instant je sais où je suis et où je vais ! Trop cool !

14H40 : Je regarde ma chienne à mes pieds, bien calé dans ses coussins, et je repense à l'allure qu'elle a quand elle pique un sprint. Je repense à ce lundi matin avant de partir, quand nous étions sur la plage des Anses d'Arlet. Je l'ai faite asseoir, j'ai enlevé sa laisse et j'ai dit : Zika, Allez !
Vous l'auriez vu partir comme une fusée ! Un vrai lévrier des mangroves ! Bordel, qu'est-ce qu'elle est belle ma Zika quand elle court... Vous n'avez pas idée. Il faudra que je la filme un jour.
Pour l'heure, elle passe ses journées et ses nuits cloîtrée dans sa maison qui n'arrête pas de rouler, de rouler encore... Et si elle le fait, c'est pour moi. Alors oui, j'ai un peu honte de moi sur ce coup-la. Pardon ma Zika.
Mais tu vas voir, cela va valoir le coup au final, je te le promets ! Là bas tu pourras courir après les singes, les iguanes, les perroquets, les caïmans... Non, pas les caïmans ! Tu t'approche pas des caïmans ! (En plus tu nages comme une casserole) Tu verras, je suis sûr que ça va te plaire. En plus, je me suis renseigné et on m'a dit que là-bas les gens adoraient les chiens ! Pas comme ces méchants martiniquais qui, pour la plupart, ne pensaient qu'à te donner des coups de pied !
(J'ai bien dit pour la plupart hein ! 80% pas plus. Les 20% qui restent sont super-sympas avec les chiens, alors ne commencez pas à m'engueuler)

16H10 : Au fait, permettez-moi d'apporter une petite précision concernant cette nave. J'ai dit que nous allions au Rio Dulce au Guatemala et c'est vrai. Mais d'abord nous devrons faire un arrêt dans le port de Livingston afin de sacrifier au rituel immuable des formalités migratoires, douanières, policières et sanitaires. Ce n'est que le lendemain, ou le surlendemain, ou même après, tout dépendra de mon état physique et celui du bateau, que nous pourrons entreprendre la remontée du fleuve. Cela devrait nous prendre une petite journée pour rallier la ville de Fronteras où ce trouvent les marinas. Donc, la destination de cette Trans-caraïbe, puisque c'est comme ça que ça s'appelle, sera Livingston, département d'Izabal, Guatemala.

16H40 : Deux choses importantes de faites ! 1) Je viens de chier. Ce qui met fin à ma constipation habituelle les premiers jours de nave. 2) Je me suis rasé !

16H50 : Merdum. Il y a un gros cumulus qui arrive droit sur nous. A mon avis, je ferais mieux de ranger un peu le cockpit et de mettre tous les trucs qui craignent à l'abri. Je n'aime pas les grains en général, mais les grains par vent arrière, je déteste !

17H40 : Ça y est, c'est passé. Peu de pluie, mais pas mal de vent. Le problème c'est que j'en aperçois un autre qui arrive derrière. Je sens que la soirée va être longue...

18H05 : Ouf ! J'ai réussi le tout de force de donner à manger à Zika, faire le point et ensuite rameuter le troupeau pour l'enfermer dans l'étable avant que le prochain grain n'arrive. Je ne vous cache pas que ça a ruer dans les brancards, mais parfois faut c'qui faut.

18H15 : Si mon GPS ne m'indiquait pas que je suis en train de faire route vers l'Ouest, ce serait ma montre qui me le dirait. En effet, il y a trois jours le soleil s'est couché vers 17H30, alors qu'à présent le disque jaune disparaît sous l'horizon ver 18H00. Et ça va être comme ça tout du long. C'est pour ça que j'ai décidé que pour cette Trans-caraïbe, puisque nous allions traverser deux fuseaux horaires, j'allais pratiquer le changement d'heure à bord. Lorsque nous serons à mi-chemin, lundi normalement, je reculerais toutes les pendules du bord d'une heure. Et ensuite, une heure encore lorsque nous arriverons. Comme ça nous serons en phase avec le Guatemala.
Lors de ma trans-équatoriale en 2012, c'est une chose que je n'avais pas faite. Et je peux vous dire que le décalage à l'arrivée c'était quelque chose ! Bref, j'ai décidé que cette fois-ci je ne ferais pas la même erreur.

18H40 : Pfiouuuu... Le grain est passé, et celui-la était chaud ! Tout est détrempé ! Heureusement, j'aperçois les étoiles qui scintillent derrière. A priori on est tranquille pour un moment. Bonne nuit !



Le vendredi 30 novembre 2018

06H30 : Zut ! J'ai encore raté le point de six heures... Mais il faut dire que la nuit n'a pas été des plus facile. On a essuyé, je ne sais plus, trois ou quatre grains, et j'ai dû plusieurs fois dégager la pâle du régulateur de sa gangue de sargasses. Je crois que le dernier grain était vers 03H45 du matin... Ensuite j'ai dormi. Le bon côté de la chose c'est qu'au niveau de la route on a dû faire un carton. M'enfin, je vous dirais ça tout à l'heure.
Sinon, vers 01H30 Zika a demandé à sortir pour faire ses besoins (comme si elle ne pouvait pas le faire aux heures ouvrables hein ?). Comme ça, d'un seul et unique jappement impératif. Wouaf ! D'habitude c'est plutôt du genre : Ô Monseigneur et Maître, regardez cette mine affreuse que j'ai ! Entendez ces soupirs qui émanent du plus profond de mon cœur... Là c'était Wouaf, j'ai envie de chier !
Je me demande si mon équipage n'est pas en train de fomenter une mutinerie derrière mon dos...

07H05 : 61,5 Milles de parcourus en treize heures ! Ça fait une moyenne de 4,75 Nds. Cap au 285°. C'est presque parfait. Dommage qu'avec La Boiteuse ce genre de chiffres ne s'obtiennent que dans l'inconfort et la douleur.

07H05 : Bon ben les enfants, je crois qu'on va manger du grain ce matin. Il y en a un qui est en train de nous passer devant, et le suivant sera très probablement pour notre pomme.

07H30 : Ah... On va peut-être éviter la douche finalement... Tout à l'heure j'ai fait un petit tour d'inspection sur le pont. J'en ai profité pour balancer les crottes de Zika par dessus bord, mais j'ai aussi observé avec attention mon écoute de foc et plus particulièrement l'endroit où elle est prise dans la mâchoire du tangon. On voit bien que ça rague (ça frotte et ça use), mais pas de quoi s'alarmer pour l'instant.
De même, j'apporte une attention toute particulière à mon portique. Je sais qu'il n'est pas aussi solide que je le voudrais, surtout depuis que j'y ai fixé un deuxième panneau solaire de 150 W en prévision de...

Ah ben si, la douche ! J'ai juste le temps de m'abriter sous mon vieux duvet de l'armée avec Zika ! Duvet qui n'est plus si étanche après trente ans, vous vous doutez bien.

Qu'est-ce que je disais ? Ah oui ! Un deuxième panneau en prévision de la latitude plus élevée du Guatemala, et du ciel généralement plus couvert qu'en Martinique. C'était en février de cette année... Comme quoi, quand je vous dit qu'il s'agit là d'un projet longuement mûri, c'est vrai !
Bref, faire fabriquer un nouveau portique ad-hoc m'aurait coûté beaucoup trop cher au Marin. Surtout que dans l'idéal j'aimerais assez un portique en résine époxy, ou en alu, du genre de ceux qu'on trouve sur les OVNI, ou sur les Allures. Re-bref, j'ai fait au mieux avec ce que j'avais en apportant un soin particulier au haubanage avec de la tresse de dynéma de 6mm. Ce n'est pas très joli, mais ça tient. En tous cas, on s'est pris 50 Nds au mouillage cet été, et ça a tenu.
Cependant, avec le roulis et les dérapage de La Boiteuse je me méfie un peu quand même... Voilà pourquoi je le surveille.

09H00 : Une autre des raisons qui m'ont incité à me rendre au Guatemala, c'est que a priori je pourrais y rester au moins un an, sans avoir à corrompre qui que ce soit. Parmi tous les pays que j'ai envisagé de rejoindre ; Venezuela, Colombie, Panama... Le Guatemala est le seul où je n'ai trouvé aucune info à ce sujet. Pourtant, j'imagine bien qu'il doit y avoir de la corruption comme hélas partout en Amérique centrale, mais le fait est qu'a priori il n'y en aurait pas au niveau des autorités de Livingston.
Vous le savez, ou pas si vous débarquez sur ce blog, j'ai une sainte horreur de la corruption. En bientôt neuf années de voyage, je n'ai jamais, je dis bien jamais, accepté de payer un pot de vin. Jamais. Et tant pis si cela me fout dans la merde. Tant pis si cela m'empêche d’accéder à certaines choses ou à certains endroits, mais en ce qui me concerne il s'agit d'une question d'Honneur.
Je rappelle pour info que la corruption ou l’extorsion (dans le cas par exemple ou un agent officiel vous demanderait un petit cadeau pour accélérer vos démarches), sont des délits punis par le loi dans tous les pays du monde. Y compris ceux où ces pratiques sont devenus tellement courantes qu'elle semblent « normales ». Et j'ajouterais pour finir qu'on ne donne pas un pourboire à un fonctionnaire qui fait son travail, bordel !
Donc voilà, on verra comme ça se passera, mais je sais que je ne plierais pas sur ce sujet. En tous cas, j'espère vraiment ne pas en venir à être obligé de le faire... Car sinon je vois mal comment j'arriverai à me regarder dans la glace.

12H20 : La matinée c'est bien passée, avec le même petit F5 aux fesses et une mer pas trop houleuse. Comme cette nuit j'ai peaufiné le réglage du régulateur d'allure (la tension dans les drosses doit être réglée au poil de cul près), on a fait plus ou moins la même moyenne que cette nuit.
J'ai dû jeter le poulet mariné qu'il me restait et j'ai attaqué ma provision de Noodles. A moins de pêcher, ce qui ne me tente pas vraiment vu l'état de la mer et les sargasses omniprésentes, je n'ai plus trop de protéines animales à me mettre sous la dent. Je reconnais que cette fois-ci, j'ai un peu bâclé mon avitaillement... C'était une erreur, que j'espère vraiment ne pas devoir payer plus tard.

12H55 : Bon, on a un petit souci là... La toile anti-UV de la mule est en train de se découdre par endroit. Il va falloir que je surveille ça de très près. Ma mule, c'est la voile la plus importante sur la Boiteuse. En tous cas la seule voile d'avant que j'ai, capable d'assurer vraiment dans le mauvais temps.

13H45 : On a du bol, la force du vent baisse et j'aperçois une large portion de ciel bleu derrière nous.

15H40 : Au fait, j'ai oublié de vous dire que ce midi nous avions parcouru le quart du chemin. Grosso-modo, nous sommes dans les temps.

17H25 : Bon ben je crois que la pause-grains est finie les enfants. Espérons que les gros machins tous noirs que je vois derrière me laisseront le temps de faire le point, de nourrir les bêtes, de me nourri moi-même, et de préparer le cockpit.

18H05 : 5,23 Nds de moyenne sur les six dernière heures. Yes ! En plus j'ai eu le temps de tout faire, sauf de ranger. Mais j'ai une demie-tortilla sur le feu en ce moment. On va traîné un peu le temps que je mange, ensuite tout le monde au lit !


10 commentaires:

Monique a dit…

Ah ! ça fait plaisir de retrouver le blog...

jusqu'ici, tout va bien...

J'attends la suite avec impatience mais sans craintes, sachant que tu es arrivé !!

Olivier Viret a dit…

Sympa, cette narration, on est presque à bord avec toi 👍😉
Me réjouis de la suite, et surtout très content de te savoir bien arrivé au Guate.
Cordialement bien à toi.
Olivier (globetrotteur)

Cécile a dit…

Je me disais depuis le temps, les blogs tout ça, heureuse pour toi que tu aies ces deux fideles amies à bord, elles sont magnifiques !! Je suis en manque d'animaux mon chat de 18 ans est mort en avril, je vais en reprendre un en janvier.
J'adore ta franchise et ton courage !! ✊🏻 Je t'embrasse très fort mon ami et une caresses aux fidèles amies... ❤️❤️

Chris a dit…

Salut Gwendal
et moi qui imaginais que tu étais encore planté pour de bon au port du marin comme à une huître sur son rocher et qu'en fait de nouvelles tu arrêterais ton blog pour vivre ta vie de navigateur à quai... mais non, tu as repris la mer pour le guatemala, autre port autre vie...
Bon apparemment tu es arrivé à bon port, le dernier cette fois vraiment ??
Tout ce chemin parcouru pour t'arrêter là en si bon chemin, c'est étrange de découvrir tout ce périple entrepris, cette volonté sans faille qui t'animait tant au départ et qui t'a quand même fait traverser l'océan, c'est pas rien
tu voudrais me faire croire que là sous ce stylo qui écrit le récit de ta traversée, dans ce cerveau épris d'aventure tu n'aurais pas envie encore de parcourir encore l'océan malgré tes 51 printemps ??
Blague à part, te lire c'est une bouffée d'oxygène et si de temps en temps te prends l'envie de nous raconter un peu ta vie la bas, ne te gêne pas, ça nous fera plaisir d'avoir de tes nouvelles
Bon voyage capitaine

Regis a dit…

Quelle joie que d avoir des nouvelles fraîches et rassurante de tout l équipage.c est un plaisir de lire ton blog,pense à faire un bouquin. Content pour toi et tiens nous au courant à 51 ans on est pas trop vieux pour trouver une compagne il suffit souvent d être bien sa tête! Au plaisir d avoir des novelles bientôt .bonne continuation t es un mec bien!!!!!!des News des News!!!!!

JZ a dit…

Le Rio dulcé je n'y suis pas allé par ce justement il n'y avait pas de vent; mais aussi par ce que contrairement à toi; Je ne me voyais pas y rester plus que 2 semaines...T'as bien raison de ne pas t'être arrêté à Haïti ni en Jamaïque...Même si tu ne navigues plus vers un autre pays, j'espère qie Le blog de la Boiteuse. Va continuer...A commencée par la 2ème partie. Quand je pense que je lisais ton blog lorsque tu étais au Brésil, chérchant des infos pour y aller.A ce moment je m'étais encore jamais sorti de Méditerranée, et n'avais pas non plus traversé l'Atlantique en avion. Tu m'a aussi donné envie de faire mon blog, par ce que tu apportes autre chose que ce qui existe déjà. Un peu comme si t'écrivzus juste ce qui te plait.

val a dit…

ohh, trop forte Zika en mer, Touline lui a montré;) Grand plaisir a te lire, j attends ka suite avec impatience! bravo kptain

Gwendal Denis a dit…

@Monique : Comme tu dis, jusqu'ici tout va bien... :)

@Olivier : Merci Olivier !

@Cécile : Courage, courage... C'est vite dit ! Mais c'est sympa, merci.

@Chris : Hélas, j'ai bien peur d'être arrivé à saturation. J'ai toujours voulu me poser dans un endroit qui me plaise, et le bateau et le voyage ne sont qu'un moyen d'y parvenir, pas une fin en soi.

@Régis : J'ai laissé tomber l'idée d'un bouquin... Je suis trop paresseux ! :)

@JZ : Je suis tes aventures moi aussi ! Je crois que le blog continuera rassure toi. Il y a pas mal de matière par ici... Rien qu'avec la forêt et les animaux, j'ai de quoi occuper ma vie !

@Val : Les deux font la paire c'est vrai. Je suis très fier de mes bêtes.

patrick a dit…

bonjour; cela fait plaisir de voir que c'est reparti..

Alex et Xav (AKA Blondie et Pesca) (mais c´est Alex qui ecrit)(Xav te dit bonjour) a dit…

Hey chico!
Bah sympa d´avoir de tes nouvelles, on a vu les mises a jour du blog hier soir en attendant le pere noel et en picolant un petit Bordeaux de derriere les fagots :).
Bonne exploration et decouverte de ces nouveaux lieux, on guettera les photos et tes chroniques Guatemalteques!
Bisous