samedi 13 octobre 2012

J’aime pas les mouillages

20°17.991S 40°17.341W
Vitória, Espírito Santo, Brésil

Au mouillage à Vitória
C’est un weekend prolongé ici à Vitória, puisque vendredi l’on fêtait Nossa Senhora da Conceição Aparecida (une superstition locale). Et qui dit weekend prolongé dit bien sûr pas de mécano, donc rien de particulier à faire sinon profiter de l’air du temps. Et ça tombe bien car j’en avais grand besoin.
Mon mal de dos se résorbant peu à peu, je peux enfin dormir tout mon saoul, réfléchir (pas trop), pêcher, et bien sûr écrire. Et ce matin j’avais envie de revenir sur ce que vous aviez sans doute compris, à savoir mon aversion pour les mouillages.

C’est quelque chose que j’ai longtemps eu du mal à expliquer, et qui dans le milieu du voyage fait figure d’anachronisme, voire d’hérésie. Je ne compte plus les regards incrédules, même parfois dégoutés, que j’ai pu récolter lorsque je déclarais tout de go qu’il était hors de question pour moi d’aller me tanquer dans un mouillage.
Comment ? J’allais passer à côté de ce sentiment de liberté qui fait la quintessence de la vie en voilier ? J’allais me priver de ces plages fabuleusement désertes et de ces fonds transparents ? Je préférais m’agglutiner avec ces tous ces gens, comme une huitre à sa bourriche ?
Et bien oui, je préfère.

Le Loïck à Vitória
Au début, con que j’étais, je me sentais coupable de ne pas apprécier ce qui enchante la majorité des marins-voyageurs... Je balbutiais quelques explications aussi évasives que douteuses, tentant vainement de me justifier en arguant du manque d’autonomie énergétique de ma Boiteuse, de la difficulté de la manœuvre en solo, de mon besoin de rencontrer des gens, de mon confort au quotidien, que sais-je encore... Même Touline me servait de prétexte pour justifier mon amour contre-nature de la marina.
Je débitais mes salades, ne voulant en démordre pour rien au monde, et c’est tout juste si je ne m’énervais pas lorsque la personne en face de moi insistait pour me convaincre. Têtu comme une mule le Gwen.

Et puis, lors de ma navigation précédente, et la nuit forcée que j’ai dû passer à l’ancre face aux tours de Vitória, j’ai réfléchis un peu à tout ça, et j’ai réalisé qu’en fait la raison qui primait sur toutes les autres était que pour moi, être au mouillage s’apparentait à être encore en mer... Et cette considération rejoint ma philosophie première qui est que, pour moi, la navigation n’a pas d’autre intérêt que de permettre de voyager d’un point A à un point B en emmenant sa maison avec soi.

Calanques de Cassis
Et puis franchement, même si de plus expérimentés que moi m’ont assuré du contraire, avec la Boiteuse c’est quand même très différent que d’être amarré à un quai... D’abord vous n’avez pas l’électricité de la ville, ce qui complique grandement l’utilisation de la plaque électrique, du four électrique et de mon PC de bureau électrique avec son écran 23 pouces électrique et sa connexion internet électrique. Ensuite, si vous avez oublié d’acheter le beurre en allant faire vos courses, vous devez apprendre à vous en passer, à moins de devoir vous retaper un aller-retour en annexe. Sans parler de vous laver à l’eau froide ou encore devoir vider le bac des toilettes tous les trois jours. Bref, vous êtes obligé de gérer votre vie en mode économie et rationnement, comme en navigation.
A cela s’ajoute la sécurité du bateau. A moins d’être accroché à une bouée pour porte-avion, vous ne pouvez décemment pas abandonner votre embarcation aux éléments et aux voleurs plus d’une journée. Et si votre ancre dérape, c’est un coup à retrouver votre maison sur les rochers.
Et puis comment je fais avec Touline hein ? Vous y avez pensé à cette pauvre chatte qui n’apprécie rien moins que de squatter les bateaux des autres, comment fait-elle pour monter dessus ?

Décidemment, quels que soient les arguments que l’on pourra m’opposer, je trouverais toujours le contre-argument adéquat... C’est que j’aime mon petit confort voyez-vous. Je veux bien accepter d’en chier pendant une semaine, voire trois, même quatre à la rigueur, pour aller d’un endroit à un autre, mais finalement je goûte très peu ce genre d’exercice. C’est comme les pique-niques. C’est sympa une fois où deux, mais il est hors de question de bouffer des sandwichs toute ma vie.

Ile de Porquerolle
Cela-dit, il est une situation où j’apprécierais volontiers d’être au mouillage dans un endroit sympa. Je vous la livre comme un rêve éveillé que je fait souvent :
J’imagine assez bien me passer de tout ça, pourvu que mon amoureuse soit à mes côtés. Je nous imagine tous les deux, seuls au monde, nous baignant nus dans une eau turquoise. Nous préparant des repas savoureux que nous dégusterions les yeux dans les yeux. De longues discussions sur tout et n’importe quoi. Des siestes crapuleuses bercées par le ressac. Le temps s’arrêterait, nous serions heureux...
Là oui, dans ces conditions je signe des deux mains.

Mais tout cela ne durerait que le temps d’une lune de miel. Ensuite, ce serait retour fissa à la civilisation et à ses bienfaits !

16 commentaires:

SONIA a dit…

Tu retrouves ton humour... C'est bien !

SONIA a dit…

Euh......... Pourquoi des photos des calanques et de Porquerolles :D ?

Monique a dit…

Je dirais même plus : tu as besoin d'attaches solides et fermes....
Sacré Gwen !!!

Gwendal Denis a dit…

@Sonia : Le recul sans doute... Sinon, les photos sont en fait les trois seules fois où j'ai mouillé depuis mon départ. Porquerolle, Cassis et Vitoria.

@Monique : Peut-être bien. :)

Anonyme a dit…

Porquerolles :D :D :D :D :D :D :D

Rester au mouillage, c'est pas la routine? C'est du voyage en restant à un camp de base... une illusion de voyage en quelque sorte? enfin j'dis ça j'dis rien, je n'ai jamais vécu sur un bateau, j'essaie juste d'imaginer

Une bise de là-haut au Nord du même continent!

E.

Gwendal Denis a dit…

@Elodie : Routine pour certains... Mais pas pour moi. Enfin, pas encore.

Marie a dit…

Les mouillages, moi j aime bien en general. Bon, ok, c est pas toujours hyper confortable : en avril, j ai fini par me lever a 3h du mat' tellement je n en pouvais plus d etre ballottee dans tous les sens! Mais au moins, j ai profite d un superbe lever du soleil :-)
Et puis, j avoue, les consos en eau douce et electricite surveillees par Xavier, ca m amuse!
Et puis tu pourras aussi me retorquer qu une fois de temps en temps pendant des vacances, c est pas tout a fait pareil... :-)))
Bises

Gwendal Denis a dit…

@Marie : Et je te rétorquerais aussi que le Namasté n'est pas la Boiteuse ! C'est à peu-près la différence qu'il y a entre un deux pièces cuisine et une chambre de bonne !

'Tsuki a dit…

Je suis contente d'apprendre que ton mal de dos se résorbe...

Des photos de calanque... T'adonnerais-tu à la nostalgie ? Ah non, tu devais avoir besoin de photos de mouillage pour illustrer ton propos.

J'espère que ton amoureuse répondra bientôt à ta lettre et que vous pourrez réaliser ton rêve.

Alexandra et Xavier a dit…

Le côté positif des mouillages (calmes avec eau claire) c'est que tu vas te baigner très facilement : tu sors et hop tu sautes ! Tandis qu'à la marina, faut marcher jusqu'à la plage sous la chaleur, non mais c'est é-pui-sant :)... C'est qu'on en a des soucis quand même...

Marie a dit…

Alex n a pas du lire que tu avais comparé son joli bateau à un 2-pièces cuisine! Tu as deja vecu dans une chambre de bonne? Moi oui ( et dans le 16eme s il vous plait!), du coup, je suis sure que la Boiteuse est plus sympa :-)

Alexandra et Xavier a dit…

Ola Marie, sympa de te croiser par ici! Eh eh trop drôle le Xav' dans le rôle du gendarme de l'eau et de l'élec dans son 2 pièces cuisine qui flotte :), on va troquer sa casquette de capitaine contre un képi! Bizzz

Thomas a dit…

En fait tu n'as pas du tout l'âme d'un Robinson Crusoé, la solitude c'est pas pour toi, il te faut du lien social fort (des attaches comme dit Monique). La civilisation c'est le lien social plus l'électricité !

Anonyme a dit…

je réagi à ce commentaire un peu en retard . Je suis tres , tres , tres heureuse de trouver enfin quelqu'un qui a à peu pres les memes vues que moi sur la voile en general . Peu osent avouer que la voile n'est pour eux qu'un moyen de locomotion et que le mouillage manque cruellement de confort . Pour ma part , je deteste les navs ,meme si nous avons deja effectué plus de 7000 miles ,le vent et le soleil , le sel qui colle à la peau , mais lorsque je le dis sans aucune honte , je passe pour une extra terrestre , quant aux reactions des sois disant puristes , ( qui sont en fait bien souvent des grandes gueules qui ne sont jamais sorti d'une rade )ils levent les bras au ciel et leurs reflexions sur le sujet m'emmerdent profondement.On va peut etre pouvoir ouvrir un club à nous deux , le debut d'une nouvelle reflexion sur la voile , et où les caps Horniens n'auront rien à y redire !!!
je te souhaite tout le courage du monde , et peut etre nous retrouverons nous coté pacifique un de ces jours .

Anonyme a dit…

J'AI ENVOYE UN COM TOUT A L'HEURE EN ANONYME MAIS J'AVAIS PAS VU QUE CES DERNIERS NE SERAIENT PAS PUBLIES ;(COMME QUOI MOI NON PLUS JE N'AIME PAS LES MOUILLAGES ) ALORS JE TE DONNE LE NOM DE MON BATEAU : C'EST FANOU DE SHOW DE VENT ;GROS BISOUS DE LA PART DE TOUT L'EQUIPAGE

Gwendal Denis a dit…

@Fanou : Bienvenue au club !