Le 11 juillet 2010
41°46'40.42"N 3° 2'5.95"E
Barcelone-Sant Feliu de Guixols
Huit heures de moteur... C’est long. C’est chiant. Ça fait du bruit et ça sent mauvais. Mais en même temps quand vous avez le vent dans le nez et pas de temps devant vous pour attendre la bascule, vous n’avez pas vraiment le choix.
En plus de celui de remonter vers Sète, l’objectif de cette journée est de se trouver un endroit pour regarder la finale de la coupe du monde de football opposant l’Espagne au Pays-Bas...
Oui je sais. Ça va être le premier, et le seul, match que j’aurais vu cette année. Mais en même temps il faut bien supporter l’équipe du pays qui nous reçoit, c’est de la plus élémentaire des politesses.
Sinon, ces heures interminables au moteur aillant pour conséquences de favoriser la réflexion, j’ai un peu avancé dans mon petit bilan perso.
Le pied, c’est gagné. On dirait qu’il ne s’éclate que sur l’eau ce con ! Trituré, sollicité en permanence par la compensation d’équilibre, il n’y a que comme ça qu’il semble s’épanouir. Sur terre, le moindre effort relève du calvaire, alors que sur l’eau... C’est à n’y rien comprendre.
Vous me verriez au bout d’une semaine sauter du bateau sur les pontons flottants l’haussière à la main ! Un vrai singe !
Bon d’accord, un gros singe je vous l’accorde, mais un singe quand même.
Sant Feliu, c’est probablement le plus joli port dans lequel nous nous soyons arrêtés... C’est d’abord et avant tout un port de pêche et on sent bien qu’il y a des gens qui bossent ici. De plus il remporte haut la main le ruban rose des plus beaux sanitaires ! Et cette capitainerie incrustée dans les rochers... La classe.
Le soir on s’est un peu empêtré dans les horaires et ce n’est que vers 21h15 que nous prenons le chemin de la ville pour trouver un troquet où regarder le match.
Dans mon esprit j’avais imaginé une soirée dans un bar sur-bondé avec des drapeaux, des clients enthousiastes, des conversations multilinguales... Vous voyez le genre ?
Et bien ce fut un peu différent.
Comme nous avions trainé un peu et rater la première mi-temps, nous nous sommes pointé, à huit, dans le premier rade que nous avons trouvé. A savoir une terrasse de bar près du port de pêche qui jouxte le port de plaisance.
Sous l’auvent de la terrasse, une douzaine de clients, tous des hommes et visiblement immigrés, sont là, sirotant une bière ou un jus de fruit, et picorent des olives.
J’entre le premier et demande si on peu boire un coup et regarder le match... Si, no problemo. Vamolos.
On s’installe au fond du truc, mais on sent bien que notre présence n’est pas... Comment dire... Ce n’est pas qu’on dérangeait, non, mais on faisait un peu tâche quand même.
Certains d’entre nous émettent même le désir de mettre les voiles... Mais trop tard, la patronne est déjà là pour prendre les commandes. Bon ok, on prend un verre par politesse et puis on se casse discretos.
C’est là qu’on avise l’écran de la télé et qu’on constate que le patron a comme un souci avec son antenne...
Imaginez un peu : Une télé visiblement apportée pour l’exceptionnelle occasion, et son propriétaire planté à côté, les bras en l’air, tentant désespérant de maintenir un signal pour le moins capricieux.
Et que je t’oriente le machin dans tous les sens. Avec la main gauche. La main droite. Les deux en même temps... Lorsqu’enfin il arrive à obtenir quelque chose de correct et qu’il essaye de soulager ses bras engourdis par l’effort, paf l’image se barre !
A un moment il arrive enfin à trouver un bon angle et essaye tant bien que mal de monter une espèce de piédestal pour maintenir l’antenne. Un seau à glaçon, un distributeur de serviette en papier... Ça branle de partout. Ça tombe. Son fils débarque et l’engueule comme du poisson pourri : « Mais pourquoi tu as touché l’antenne ? Elle marchait bien avant ! » (En catalan dans le texte).
Le père de sourire, penaud... Et l’image de tressauter comme si elle était douée d’une vie indépendante.
Et pendant ce temps-là le match se transformait en une partie de kick boxing, et s’éternisait avec un 0-0 qui laissait augurer des prolongations... Ce qui n’était pas forcément une bonne nouvelle à la fois pour l’Espagne et pour le vieux monsieur qui tenait l’antenne.
Nous, au fond de la terrasse, on était plié de rire. Discret le pliage, mais pliage quand même.
Prolongation donc, but d’Iniesta. Hurlements dans le bar et dans la rue. Plus que quelques secondes avant le coup de sifflet final et la victoire de l’Espagne !
Cinq secondes... Quatre... Trois... Deux... UN...
C’est alors que retentissent les sirènes des bateaux dans le port. Toutes ensembles. Un son profond qui vous fait dresser les poils sur les bras.
Impressionnant.
Aussitôt voilà tous les clients, à part nous, qui se lèvent comme un seul homme et se précipitent sur le quai pour, croyions nous, laisser éclater leur joie en courant partout comme des débiles.
Que nenni.
Nous n’avions pas vraiment fait gaffe (en tous cas moi), mais à quelques mètre, amarrés les uns aux autres, une douzaine de bateau de pêche au lamparo, des unités de 20 m quand même, poireautaient. Et je ne sais pas si vous le savez mais la pêche au lamparo ça se pratique la nuit. On part le soir à la tombée du jour et on revient le lendemain... Les bateaux étaient donc restés à quai pour le match, amputant ainsi cette nuit de pêche. Mais sitôt le coup de sifflet final les capitaines se sont empressés de rappeler à bord tous les équipages !
Je ne vous raconte pas le bordel.
Les marins se précipitent. On charge au plus vite les dernières palettes de sacs de glace que l’on enfourne dans les cales. Ça crie, ça court dans tous les sens. De puissants projecteurs illuminent toute la scène.
Les moteurs rugissent dans la nuit, faisant retentir leurs milliers de chevaux. Les premiers bateaux s’écartent de leurs camarades et mettent la gomme alors même qu’ils sont encore dans le port.
L’eau bouillonne. Les barques d’accompagnement font du surf dans le sillage laissé par ces monstres. Un à un, ils partent pleine balle en direction du large.
Nous sommes restés là, sur le quai, à regarder ce ballet fabuleux de machines rugissantes. Elles se tirent la bourre dans le chenal, se doublent, se frôlent sans se toucher... On dirait qu’elles dansent. De nouveau on entend les sirènes lorsque les bateaux passent les bouées du port.
Putain que c’est beau... J’en ai des frissons partout. Je mitraille à tout va, prenant des clichés pas toujours réussis. Je me remplis les yeux de ce spectacle magnifique.
En dix minutes, montre en main, le port était vide.
La nuit sera courte pour ces pêcheurs, et certainement peu fructueuse... Mais qu’importe, ils sont Champion du Monde après tout.
Le lendemain matin, alors que j’assistais à mon levé de soleil désormais quotidien, j’ai aperçu le premier de ces bateaux qui rentrait au port...
A suivre...
19 commentaires:
belle soirée pour le fou de foot que tu es !
Pour ton pied, tu sais ce qu'il te reste à faire .!
@LCFR : Après ce ballet nocturne, le résultat de la finale m’a paru bien secondaire...
Quelles aventures... C'est vraiment un plaisir de déguster des yeux tes narrations, dans un thème qui me touche, et qui n'est pas sujet à polémique (clin d'oeil, bisous)...
@’Tsuki : Oh, c’est bien gentil ce que tu me dis là 'Tsuki. Merci !
Belle nuit , en effet, avec le temps suspendu du match et la vie qui reprend immédiatement après !
J'aime bien ce regard que tu portes.
Là ...de ce moment si particulier!
@Monique : Merci ma Momo ! C’est vrai ? Ça t’a plu ? J’suis content !
J'ai tout lu, tout suivi.. même que j'avais déjà fait un commentaire mais qui est passé à la trappe (à la soute??, par dessus bord??).
Un avant-goût prometteur de ce que pourraient être les notes de carnet de bord du Cap'tain Gwen lors d'un voyage autour de la méditerranée...
Bon, ça manque de pleins de photos qui doivent figurer sur des cartes mémoires non accessibles... mais que notre marin préféré pourrait mettre en ligne (de flottaison).
Et de vidéo... puisqu'après cet essai de filmage panasoniquien, je pensais que tu aurais pu mettre à profit cette première escapade voilesque pour nous faire profiter de quelques instants de mer, que nous aussi nous ayons un petit aperçu du clapot, du claquement des drisses sur le mât, des voiles, des impressions de houle, etc. Bah... sans doute que ce sera pour la prochaine fois!!
Et c'est quand... la prochaine fois??
@Cazo : C’est du vécu comme dirait l’autre !
Et oui effectivement ça manque de photos et de vidéos... Le souci c’est que j’ai fait quelques 957 photos sur ces quinze jours et qu’il va me falloir un peu de temps pour toutes les réduire afin de les mettre sur un site...
Pour les vidéos, j’en ai quatre ou cinq... Et la première sera pour le prochain épisode !
‘Tain ! T’es un impatient toi !
je ne peux pas te dire... te parler, Gwen, mais je te lis chaque fois...
et je t'aspire ton enthousiasme et ta force!
t'es magnifique!
pour ça, Merci!
Bises! *_*
@Cécile : Cela me touche beaucoup ce que tu me dis-là Cécile...
Un mini hommage à ton immense talent ici : http://lunedemaledaumon.blogspot.com/2010/07/retenant-les-fantomes-de-joie-lhorizon.html
Merci d'avoir partagé ton carnet de bord, il m'a vraiment plu...
J'attends moi aussi la suite, maintenant !
@'Tsuki : Wouha ! Un immense talent ? Rien que ça ? Faut arrêter sinon je vais avoir un de ces melons moi !
Blague à part, Merci Tsuki.
Voilà qui va me permettre de m'en payer une bonne tranché, té... (De melon, bien sûr, huhu)
Eh, oh, les filles... n'en faites pas trop non plus.. déjà qu'il a une cheville enflée... ;-) !!
Mais bon, je partage l'enthousiasme général.
Pour ce qui est des photos, je me doutais un peu de la chose... mais suis ravi de savoir qu'il y a aussi de la vidéo (ça va le faire, j'en suis sûr !!).
Vivement Farinet 4... Bon, même si c'est mon tour pour l'organisation, y a pas de problème !! Je prévois un gîte dans les pyrénées... ça devrait le faire aussi ;-) !!
Je suis d'accord, ça manque de vidéo d'entrainement, le blog classique on sait que tu es doué mais en vidéo on ne fait encore que le deviner et ça nous chatouille de te voir à l'œuvre. Cette nuit te montre que les sujets impromptus à faire partager ne manquent pas et qu'on en redemande.
P.S: Un petit truc si tu veux réduire tes photos en masse et sans te casser le tronc: sois tu utilises la fonction macro de Photoshop, c'est assez simple et très efficace. Sois avec Windows tu les sélectionnes et tu les clic-droites pour "Envoyer vers" un message électronique, il te propose de les réduire et tu les récupèrent en pièce jointe du message qu'il t'a ouvert. Sinon tu utilises Picasa, on dit que c'est très bien fait pour gérer ce genre de choses, et aussi les corrections de couleur, l'anti-yeux rouges etc. Mais j'enfonce peut-être des portes ouvertes.
Hé,les gars !Ne lui mettez pas trop la pression quand même !
@Cazo: j'avais imaginé que le Farinet 4 pourrait se faire sur le bateau de GWEN ..genre inauguration, juste une visite et un petit tour pas trop loin des côtes ...et le gite dans le Pyrénées, yes! pour la 5ème tournée! On met les bouchées doubles, cette année !
Que d’enthousiasme ! Je suis bouleversificationné...
@’Tsuki : Arf ! ET la pastèque en cette saison c’est pas mal non-plus, non ?
@Cazo : Une cheville sur deux je te le rappelle... ça veut dire que je garde au moins un pied sur terre ! Pour les vidéos, j’en ai une qui j’en suis sûr ne vous décevra pas... Dans le genre anthologie ça le fait bien.
@Aslan : Non tu n’enfonces pas des portes ouvertes, bien au contraire car cela me posait un problème de les convertir une à une.
Cela-dit, même si l’appareil photo est plutôt assez efficace (vous en jugerez), cela ne vaut pas un minicaméscope... On ne peut pas zoomer entre autre, et puis ça bouffe vite de la mémoire ces machins. Heureusement que Xavier m’a filé deux vieilles SD sinon je n’aurais pu rien faire. Merci Xav’ !
@Monique : Ouais t’as raison ! Mais je crois que je suis assez grand pour me la mettre moi-même la pression... Depuis que je suis rentré je me lève tous les jours à 03h30 pour écrire !
Mais bon, plus qu’un chapitre, ou deux, et j’en aurais fini. Après ça je pourrais entreprendre de recaler mon cycle chrono-biologique !
Très bon, le décalage entre la soirée foot minable et la beauté de la danse des bateaux sur la mer nocturne.
Et puis j' ai enfin compris comment tu fais pour abattre autant de boulot : tu ne dors pas ! je n' essayerai pas cette méthode ...
@Bourreau : Le spectacle, le vrai, le beau, n’est pas forcément où on le croit...
Hélas, même si je n’ai plus la pression de vouloir à tout prix terminer ce journal de bord, je n’arrive toujours pas à retrouver un cycle « normal ». 04h30 ce matin...
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