Le jeudi 07 avril 2011
43°23.811N 03°42.063E
Sète
Réveil, quatre heures du matin. Bon, pour moi qui voulais partir à quatre heures, c’est râpé… Ça commence bien.
Je saute dans mon futal, m’avale en vitesse deux tasses de café, et à 04H45 je largue les amarres. Direction le ponton à carburant.
Je rajoute les 20 litres qui me manquaient pour être plein à ras-bord, et nous voilà parti… A peine arrivé dans l’avant-port, et alors que je mettais un peu de gaz, un bruit d’eau qui gicle m’incite à jeter un œil dans la trappe de visite située en arrière du moteur, au niveau de l’arbre d’hélice. Aïe ! Je coule !
Petit retour en arrière. Depuis quelques jours je savais que j’avais une fuite au niveau du presse-étoupe, c’est-à-dire à l’endroit où l’arbre de l’hélice traverse la coque pour rejoindre l’extérieur du bateau. Oh, pas grand-chose, juste quelques gouttes régulières, un peu comme une perfusion si vous comprenez l’image.
Sauf que là, j’avais l’impression d’avoir une fuite grosse comme le pouce !
Voilà le merdier... |
Bon, pas de panique. Je fais demi-tour, retourne m’amarrer au ponton carburant, et me voilà à cinq heures du mat en train d’écoper les fonds de la Boiteuse. J’en retire au moins 30 litres de flotte avant de pouvoir y voir quelque chose. Je fais un essai avec l’arbre qui tourne et je constate que la fuite est toujours aussi minime… En fait, l’eau ne rentre que quand le moteur tourne, et ça c’est déjà un bon point. Ensuite, n’ayant pas écopé depuis un sacré bout de temps, l’eau en s’accumulant commençait à entrer en contact avec l’arbre et ce sont les rotations de l’arbre qui la faisait gicler à gros bouillon.
Rassuré (enfin un peu), je repars. Il est 06H30, et j’ai déjà deux heures et demie de retard sur mon programme.
Goodby Marseille ! |
Dehors, le ciel est en train de s’éclaircir légèrement annonçant l’arrivée du jour. Des lumières de partout, mouvantes. Il y a du monde sur le plan d’eau et je dois slalomer entre les ferrys, les pêcheurs, les pétroliers, les cargos et les paquebots. Je me dégage du trafic et je mets le cap à l’Ouest.
Les milles s’enchaînent les uns après les autres, monotones, comme cette côte de Camargue tellement plate que la navigation à vue y est une gageure. Heureusement, le GPS est là pour me facilité les choses : « Heu… logiquement, ce que je ne vois pas, là en face, ça doit être… Beauduc. Bah, si tu le dis mon bonhomme ! »
Même pas peur ! |
La mer est d’un vert bouteille un peu sale, chargée qu’elle est par les alluvions du Rhône. A tout hasard je mets ma ligne à l’eau, mais je pense que je vais un peu trop vite pour que celle-ci me ramène quelque chose. Je bouquine, le casque sur les oreilles en écoutant la radio. L’avantage du casque c’est qu’il atténue un peu le bruit du moteur, mais l’inconvénient c’est qu’il occulte le sens principal du marin, l’ouïe. Et ça, je vous jure que c’est angoissant quelque part… A chaque bruit un peu fort et bizarre, je retire brusquement le casque et je passe quelques secondes stressantes à tendre l’oreille pour identifier ce qui peut clocher… Pas bon pour les nerfs ça !
Midi, j’ai faim. Je me prépare un frichti à base de restes. Un fond de lentilles, trois tranches de jambon émincées, deux œufs et une poignée de fromage râpé, et voilà ! Bon ok, l’aspect est peu ragoûtant je vous l’accorde. Mais je me suis régalé !
Miam ! |
14H00, j’ai fais plus de la moitié du chemin et pour la première fois depuis mon départ je n’aperçois ni de bateau à l’horizon, ni la terre. C’est le vide. Le grand, l’immense vide…
16H45 alors que je croise de nouveau des chalutiers une mouette semble s’intéresser de prêt à mon leurre qui batifole dans mon sillage depuis ce matin. Je ramène la ligne, mais cette conne attaque et je manque de peu de la pêcher ! Et c’est à ce moment que je jurerais avoir aperçu au loin une troupe de dauphins… Mais bon, c’était peut-être aussi un effet de mon imagination. J’attends ce moment avec une telle impatience qu’il est tout à fait possible que je prenne mes désirs pour la réalité.
Euh... C'est pour moi ? |
18H00, la brume est là… Une purée de pois comme je n’en n’ai vu qu’une fois (pas très loin d’ici d’ailleurs). Un peu inquiet, j’allume le Mer-veille et je redouble de vigilance. Bip-bip-bip ! Il y a du monde devant.
Et effectivement, peu après j’aperçois la silhouette d’une vedette qui me passe devant par bâbord. Elle passe, et change soudainement de cap pour se diriger vers moi… Elle a une drôle de silhouette qui me rappelle quelque chose… Oh, c’est la Douane !
La vedette approche et un type sur le pont me fait signe, les bras en X, de stopper. Je mets au point mort et je descends récupérer la VHF portable. Je la lui montre, et il me fait DIX avec ses deux mains ouvertes. Je passe donc sur le canal 10.
- « La Boiteuse, la Boiteuse de DF16, DF 16… »
- « DF 16 de La Boiteuse, je vous reçois… »
- « La Boiteuse de DF16, ici la Douane Française, veuillez vous préparer à être abordé »
- « Bien reçu, comment on procède ? »
- « Maintenez cap et vitesse réduite, nous montons à bord »
- « Bien reçu… »
A l'assaut ! |
Ils mettent alors le zodiac à l’eau et une minute plus tard deux douaniers armés montent à bord. Le premier me demande les papiers du bateau, et le second m’ordonne de rester assis à l’extérieur (?). Sauf que les papiers sont à l’intérieur…
Bref, pendant que je répondais aux questions de l’un (provenance, destination, vous avez quelque chose à déclarer ?), l’autre se met à fouiller le carré et la cabine. Superficielle la fouille, mais il m’a quand même ouvert un paquet de tabac neuf pour voir ce qu’il y avait à l’intérieur !
Et moi pendant ce temps-là, j’avais un sourire de crétin affiché en permanence sur le visage. Pensez-donc ! C’était mon premier abordage par les autorités, j’étais content comme tout ! En plus ils m’ont laissé prendre quelques photos en souvenir !
Quinze minutes plus tard, l’affaire était entendue et ils repartaient comme ils étaient venu avant que de disparaitre rapidement dans la brume.
Vous avez quelque chose à déclarer ? |
Cette brume m’accompagna jusqu’à mon arrivée à Sète. Où j’ai accosté à exactement 21H15, soit après un peu moins de quinze heures de navigation. Je jette un œil à l’arbre d’hélice, tout est ok. Juste un peu de flotte dans les fonds. Je suis content. De moi, de mon bateau et de son moteur. Cette brave Mercedes m’a amenée à bon port sans cafouiller et je vous avoue que c’était une de mes craintes… Autant je pense pouvoir me débrouiller si j’ai une avarie de gréement, autant en mécanique je suis une quiche.
Sitôt arrivé je croise un copain que j’ai plusieurs fois rencontré sur son Sangria. D’abord ici à Sète l’année dernière, puis Antibes. Lui aussi vit sur son bateau, et nos discussions m’ont fortement inspirées pour ce projet… Je ne sais pas, mais j’avais l’intuition que je le verrais ici… Et je pensais à lui pas plus tard que ce matin. C’est bizarre la vie parfois.
Ah oui, j’oubliais, aujourd’hui c’était mon anniversaire ! J’ai eu droit à un coup de fil de Thérèse le matin et un autre de Monique alors que j’approchais de Sète. Sans compter les douaniers qui m’ont, eux aussi, souhaité un bon anniversaire ! Content le Gwen !
Enfin ! |
Bon, ce vendredi, et ce malgré le fait que je me sois levé à trois heures du mat (Grrrr…), je vais régulariser ma situation auprès de la Capitainerie. Trouver un point Wifi pour vous envoyer tout ça, et ensuite je m’attèlerais au rangement du bateau. C’est que le premier invité pour le baptême de la Boiteuse arrive ce soir mine de rien !
Il faudrait que j’arrive à trouver un moment pour dormir aussi… Ouais, ça serait bien.
Go West ! |
Plus belle la vie |
J'aime pas la brume... |
3 commentaires:
Rôôôô!!!! La tête que tu tire sur ta dernière photo! C'est pas parce que tu as un an de plus que tu dois avoir cette tronche!
Bon, je te taquine comme à mon habitude!
Ca doit faire bizarre de se faire aborder comme ça! Hi, hi! J'imagine bien tiens! Et toi, avec ton sourire en coin!
Bon et pour ta fuite, tu as fait quelque chose?
Bon baptême à la boiteuse, profitez bien d'être tous ensemble et prenez le bon temps quand il est là!
Gros bisous à tous!
Cacahuette
très belle journée à vous
dp
@Thérèse : T'as rien compris, ça c'est mon air concentré et scrutateur ! Genre, la vigie opérationnelle ! Bises.
@DP : Merci beaucoup, elle l'ont été en effet. Re-bises.
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