23°06.817S 44°15.480W
Matariz,
Ilha Grande
Praia... |
C'est
la fin de la matinée ici dans la baie de Matariz. Le temps est la
pluie, vent du Sud oblige, et j'écoute de la musique pendant qu'un ragoût Pommes-de-terre-Saucisses mijote sur la cuisinière.
Tout
allait bien, tranquillement, une légère pointe d'ennui flottait
dans l'air, lorsque je me suis dit qu'il était peut-être temps que
je vous parle un peu mieux de ce lieu où je me trouve. Mais par delà
la simple description, je voulais surtout tenter de vous expliquer
pourquoi j'aime autant cet endroit.
Cela
va faire trois semaines maintenant que j'ai débarqué dans cette
île, et que la Boiteuse se dandine sur son ancre à quelques brasses
du rivage. Pour quelqu'un qui, il y a peu, critiquait les mouillages,
vous allez vous dire que j'ai : soit complètement changé d'avis sur
le sujet ; soit que je suis en train de souffrir le martyre. Je
répondrais, les deux mon Capitaine. Mais bon, ce n'est pas là le
sujet d'aujourd'hui.
Ce
que je voulais vous dire c'est que depuis tout ce temps, et à
l'instar de mon bateau, je crois que je fais maintenant partie du
paysage.
Lorsque,
deux fois par jour je descends à terre avec ma petite annexe rouge,
je peux être sûr que je vais devoir me fendre d'au moins une
demie-douzaine de « Hopa! », et d'autant de pouces levés
pour répondre aux saluts qui me sont adressés. Pour la plupart
d'entre eux, je suis le Gringo Cachimbo, le gringo à la
pipe. Celui qui vit là depuis trois semaines et ne fait pas de
vague. Mais attention, je ne vous parle pas de saluts informels du
genre signe de tête et bonjour vaguement murmuré que vous adressez
à votre voisine du dessus quand vous la croisez dans l'escalier. Je
vous parle de vrais et francs bonjours, avec sourires, yeux dans les
yeux et parfois même quelques mots histoire de prendre de mes
nouvelles ou de commenter le temps qu'il fait.
En route vers le continent |
Cela
n'a peut-être l'air de rien ce que je vous dis là, mais je peux
vous affirmer que d'être salué ainsi, pour la seule raison que
c'est la première fois qu'on vous croise de la journée, est pour
moi quelque chose de rare et de précieux. Car voyez-vous, depuis
bientôt deux ans, j'avais plutôt pris l'habitude d'être considéré
comme un dollar sur pattes, et que les saluts dont je faisais l'objet
étaient très (trop) souvent conditionnés par ça.
À
Matariz, personne n'a rien à me vendre et tout le monde me dit
bonjour parce qu'ils ont envie de me dire bonjour. (Enfin, quand je
dis que personne n'a rien à me vendre, c'est faux. Avant hier le
poivrot du coin est venu me demander, en s'excusant presque de sa
démarche, si j'étais intéressé d'assaisonner mon tabac à pipe
avec une production locale... Si vous voyez ce que je veux dire. J'ai
répondu : non merci, mais c'est gentil de me le proposer ! Depuis,
on est des superpotes.)
Remarquez,
même si les gens d'ici avaient quelque chose à me vendre, je ne
crois pourtant pas que l'appât du lucre conditionnerait leur
gentillesse, comme c'est trop souvent le cas ailleurs. Car je crois
pouvoir dire que les Brésiliens en règle générale, et plus
particulièrement ici à Matariz, sont gentils. Entendons-nous bien,
je vous parle d'une vraie gentillesse, d'une vraie serviabilité,
d'un désir sincère d'aider autrui...
Je
ne compte plus les fois où, lorsque je demande mon chemin à un
commerçant, celui-ci sort de son échoppe pour m'accompagner jusqu'à
ma destination ! Ou, pour le moins, suffisamment longtemps pour qu'il
soit certain que j'arrive à bon port !
De
même, depuis que je suis au Brésil jamais personne n'a tenté de
m'arnaquer de quelques manières que ce soit. Et ça, après le Maroc
et le Cap Vert, je peux vous dire que c'est quelque chose
d'éminemment appréciable .
D'accord,
vous allez me dire que je ne suis pas allé partout, et notamment
dans les grands centres touristiques comme Rio ou Salvador do Bahia,
et que je ne peux me permettre de généraliser. Certes, mais je
doute toutefois que, à part quelques rares exceptions, les choses
soient différentes. Je crois que c'est finalement une
caractéristique du peuple brésilien : la gentillesse.
Miss B en bon voisinage |
Mais
revenons à Matariz. Au début, lorsque je descendais à terre je ne
parlais en fait qu'à deux personnes, l'épicier et Diego, l'étudiant
en tourisme qui me permet d'utiliser sa clef 3G. En chemin, je me
contentais de signes de tête accompagnés d'un sourire, et de
quelques Bom Dia ou Boa Tarde. Cette stratégie, car
s'en est une, fut payante. En peu de temps, au gré de mes balades,
les gens sont venus à moi.
Prenez
Ditinho le vieux pêcheur par exemple... Au début, je laissais
mon annexe sur la plage, mais le moteur de celle-ci avait la fâcheuse
tendance à ne plus vouloir démarrer après quelque temps en
position inclinée. Aussi, lassé de devoir ramer une fois sur trois,
je décidais d'amarrer Miss B à l'ancien ponton en béton. Un jour,
en revenant d'une session Internet, je trouve mon annexe amarrée à
une vieille barque de pêche, celle de Ditinho. J'étais
perplexe, jusqu'à ce que celui-ci vienne à moi et m'explique dans
son portugais quasi incompréhensible, que mon annexe frottait sur le
ponton, et qu'elle risquait de s'y abîmer Aussi, je pouvais utiliser
sa bouée si je le voulais.
J'ai
même une fois retrouvé Miss B, alors que Ditinho était parti à
la pêche, amarrée à la bouée et pourvue d'une ancre de fortune
fabriquée avec un méchant bout de corde et un vieil alternateur
tout rouillé.
C'est
ça que j'aime à Matariz, cette gentillesse, cette solidarité,
cette entraide désintéressée... Et en même temps je me rends
compte que ce qui me plaît le plus est d'ordre de l'estime de soi.
Lorsque les gens me saluent, c'est moi qu'il saluent, pas mon
portefeuille.
Voilà
pourquoi j'aime cet endroit. En plus d'un paysage magnifique, d'une
ambiance sereine, les habitants de ce village me font sentir que je
suis moi. Moi, Gwendal, le Gringo Cachimbo.
La Boiteuse |
Un bon Coco bien frais ! |
Une des rue de Matariz |
Ma pomme... |
5 commentaires:
Salut Gwen,
Je vois que tu as encore trouvé un endroit sympa où les gens semblent t'apprécier.
Ici en France et plus exactement à Hyères on a un temps un peu dégueulasse et grisouné, heureusement il fait très doux pour une fin de mois de novembre.
Je me suis trouvé au moins un point commun avec toi: j'ai acheté mon bateau aux Marines de Cogolin.
Mais un plus petit rafiot un 7 mètre Jeanneau tonic 23.
On se console comme on peut.
A bientôt, éclates toi bien pour moi.
@Jean-Jacques : Oui, je vais regretter de partir d'ici... Mais bon, l'année prochaine je compte bien m'y arrêter de nouveau !
Et pourquoi pas traverser l'Atlantique avec ? J'ai bien croisé des jeunes sur un sangria...
Tu sais maintenant qu'il y a un endroit au monde où il est doux de vivre ! Veinard !! Bisous
@Monique : Oui, celui-là je le note sur mes tablettes !
merci beaucoup pour ces belles photos, ca me rappel de tres bon souvenirs au Brésil !
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