mardi 2 novembre 2010

De Cogolin à Marseille

Le 31 octobre 2010
43° 8'10.09"N 6°22'21.96"E
Le Lavandou

Bon… Franchement je vais vous dire qu’à l’heure qu’il est (17H09), et là où je suis, attablé à mon ordi, je me tâte sur le ton a employer pour vous narrer cette journée. Oui, j’en suis là. J’hésite entre utiliser un ton désinvolte pour dédramatiser un peu la situation, ou bien y aller carrément dans le catastrophisme…

Hola ! On se calme ! Il n’y a pas eut mort du Gwen, ni de la Boiteuse, si c’est ce qui vous inquiète. Non, rien de grave. Juste une journée de merde…

Le plus simple est que je commence par le début.

Je suis donc parti de Cogolin ce matin à 08H55 très exactement. Juste avant d’appareiller, l’idée de hisser la GV (Grand Voile) avant que de sortir du port me traverse l’esprit… Par prudence j’envisageais de prendre un ris, c’est-à-dire de diminuer la surface de la voile, et comme ce n’est pas une manœuvre toujours facile a exécuter, je me suis dis que prendre de l’avance serait une bonne chose… Mais hélas le vent souffle déjà pas mal et déporte le bateau à sec de toile. Toute mon attention est prise par la conduite de la barre, donc pas question de se lancer dans un pas de deux sur le pont…

Au sortir de la jetée, le golf de St-Tropez a l’air calme. Enfin, plus calme qu’hier en tous cas.
Le temps est couvert, le ciel bas et le vent souffle plein Est, en plein dans mon cap. La mer du vent (la houle) fait dans les 0,50 à 1 mètre. Ça va. Comme je n’ai pas envie de perdre mon temps à tirer des bords dans le golf, j’accélère le moteur et décide de continuer comme ça jusqu’à mon prochain changement de cap, c’est-à-dire au niveau de la cardinale Nord de Rabiou.

Au fur et à mesure que je m’extrais de la protection qu’offre le golf de ST-Trop‘, la houle augmente et le vent forcit. Il forcit, mais en plus change de direction en s’orientant à présent vers le Sud-est. Merde, la encore c’est en plein dans mon cap si je veux pouvoir contourner la presqu’île… Je continue, toujours au moteur en direction de la cardinale Est de la Moute.

Force 4 à 5 qu’ils ont dis… Mon cul oui ! A vue de pif, je dirais du F7... Et encore je suis gentil. Et puis la houle de 1 mètres, ressemble plutôt à du trois à mon avis.

Ok, moi qui pensais éviter la baston, je suis en plein dedans.

Je décide alors deux choses. La première est qu’en plus de mon gilet de sauvetage, que j’avais revêtu dès ma sortie du port, je vais aussi mettre le harnais pour pouvoir m’attacher lorsque j’irais hisser la GV. L’étrave fait des bonds impressionnants à chaque fois qu’elle franchit la crête de la houle et retombe aussi sec de toute sa hauteur. Je pioche comme on dit dans le jargon.
Ensuite, ce n’est pas un ris que je vais prendre, mais carrément les deux. Vu comme ça souffle autant réduire au maximum la voilure. Pendant un moment j’en viens à regretter d’avoir virer le foc au profit du Génois… Mais bon, les regrets ne servent à rien, surtout dans ces moments-là.
Avant que de passer à l’action je reste quelques secondes à respirer profondément… Je n’ai pas peur, j’essaye juste de me concentrer… Allez, go, c’est parti !

Je grimpe sur le roof et me rends au pied du mât. Arrivé au mât, je m’attache avec soin et j’attaque dans la foulée le hissage de la GV. J’ai un œil sur ce que je fais et l’autre sur l’avant du bateau. De temps en temps j’arrête de tripatouiller le cabestan de la drisse de GV pour me cramponner des deux mains. La houle a encore grossie et ce sont maintenant de gros paquets de mer qui s’abattent à intervalles réguliers sur le pont. Et à chaque fois j’en prends plein la gueule.

Mais ça va. Je maîtrise. J’accroche l’œillet du ris numéro deux, étarque la bosse et je change de côté pour reprendre la bosse du ris numéro un. J’essaye de faire vite car la voile, vu qu’elle est face au vent gigote et claque dans tous les sens (on dit qu’elle faseye) et fait un bruit d’enfer. Je repasse de l’autre côté pour terminer de hisser. Allez, on hisse, on hisse….
Et c’est là, alors que je regarde comment la voile monte au mât, que je m’aperçois que celle-ci est carrément déchirée en deux sur un bon mètre, au niveau du tiers supérieur…
Merde ! C’est la tuile. La putain de grosse tuile. Et moi, comme un con, je ne me suis aperçu de rien.

Sur le moment, je ne réfléchis pas, j’agis. J’affale la GV en catastrophe, la saucissonne avec ses rabans à la va comme je peux, et je réintègre le cockpit pour me mettre en sécurité.
Hum, bon ben j’suis bon pour me taper toute la route au moteur moi ! Et puis comme on est dimanche et que demain c’est le 1er novembre, et bien c’est seulement à Marseille que je pourrais voir ce que je peux faire pour cette voile… La raccommoder ? En racheter une autre ? Bon, ce n’est pas le moment de penser à ces choses…
Je fais une ligne rapide sur le livre de bord pour signaler l’incident et je vérifie la jauge de carburant. Moitié du réservoir, soit 30 litres. Ok, j’ai de quoi faire… Enfin, j’espère. Je ne connais pas encore la consommation du moteur et puis les jauges hein ? Des fois l’aiguille elle bouge plus vite une fois la moitié du réservoir passée…

Dehors, ça empire encore. Je prends un cap au 190° et règle le pilote automatique en fonction de ce nouveau cap. Malheureusement la houle en vient alors à me frapper par le travers et fait rouler le bateau comme un bouchon de champagne posé sur l’eau. A l’intérieur j’entends quelques objets valdinguer… Bon ça ne doit pas être important car j’ai déjà rangé tout ce qui était précieux ou fragile. On verra ça en arrivant.

J’entends le pilote qui peine à corriger le roulis… Toi mon bonhomme, ce n’est pas le moment de me péter dans les doigts ! Je débranche la bête et prends la barre. Ah ! Ca va mieux ! Franchement c’est bien pratique un pilote automatique mais jamais ça ne barrera comme un homme…

Et j’ai barré comme ça pendant trois heures. Au large du cap Camarat je me suis trouvé cerné par des vagues de trois mètres cinquante de hauts… A un moment, une un peu plus vicieuse que les autres c’est même mise à déferler juste au moment ou j’allais la négocier. Splash ! Le bateau c’est pratiquement couché sur l’eau !

Le temps passe et les caps s’enchaînent : Taillat, Lardier… Et chaque fois la mer grossit à leur approche et nous secoue, mon canote et moi, dans tous les sens.
Paradoxalement, au bout d’un moment que vous barrez dans ces conditions, vous ne réfléchissez plus à ce que vous faites. Votre main, votre bras, tout votre corps agit en quasi autonomie. Ce qui fait que l’esprit se trouve alors libre et commence alors à gamberger… Et ça, c’est pas bon.
Parce que le mien d’esprit il s’est soudain mis à penser à la loi de l’emmerdement maximum, dite Loi de Murphy. Tout allait bien (si on veut !), et moi je commençais à me demander si le moteur allait tenir… Si le safran allait résister… Bref, c’est à ce moment que j’ai commencé à avoir peur. Et non-pas peur de ce qui se passait, mais de ce qui pouvait se passer… Débile !

Une fois le Cap Lardier dépassé, j’ai dû m’écarter un peu de la côte pour me mettre dans l’alignement avec le Lavandou. Oh, pas beaucoup, mais suffisamment pour que le ciel bas aidant je me retrouve à ne plus distinguer la terre.
Là, j’ai encore eu une réaction bizarre, c’est à dire qu’il y avait une partie de mon cerveau qui criait : Au secoure ! Tu n’as ni loch, ni speedo, ni GPS ! T’es fou !
Et l’autre qui me disait tout bas, t’inquiète mon Gwen, t’es bon à ce jeu là… Tu verras ça se passera bien… Tu l’as vu sur la carte, maintenant le Lavandou c’est plein Est… Tu rajoutes la dérive due au vent, voilà… Au pif c’est tout bon.

Et effectivement, une heure plus tard je sortais du brouillard pour apercevoir le port du Lavandou juste en face de moi.

Du coup, cette petite réussite personnelle m’a remis un peu de baume au cœur. Mais je n’ai pas trop eu le temps de me gargariser car il était temps pour moi de préparer mon arrivée. Je passe un appel radio pour demander une place et de l’aide pour accoster, personne ne me répond. Tant pis j’y vais. La houle est moins forte à présent, mais suffisamment pour rendre l’approche délicate. Logiquement, avec une météo normale, la procédure serait d’y aller tranquille, de faire ce qu’on appelle un tour d’honneur pour repérer où et comment s’amarrer. Mais là avec ce vent qui ne faiblit pas et cette houle à la con qui me précipite sur la plage… Je n’ai pas trop le choix. C’est un trou en un.
Putain ! C’est ça le quai visiteur ! Bordel, ça va être duraille !

Et ça l’a été.

J’ai dû m’y prendre à deux fois pour aborder ce ponton qui valdinguait au grès du vent et des vagues, et sans l’aide d’un voisin je n’y serais certainement pas arrivé la deuxième… Bref, Je me suis retrouvé amarré à la mort moi le nœud, en ayant perdu à la fois un peu de peinture et beaucoup de fierté.
Désolé.
Il était 14H30.

Quelques minutes plus tard, je me suis présenté à la Capitainerie pour m’acquitter de ma nuitée (13,60 Euros, pas cher). J’ai galéré un temps pour me brancher à l’électricité du port… Car mon fil était trop court et la rallonge qu’on m’a prêtée pas adaptée. Puis je me suis fais un sandwich au pâté. Ben oui, je n’avais rien avalé depuis le matin moi !
Ensuite, et bien malgré une envie irrésistible d’aller me pieuter, j’ai quand même fait mon boulot. J’ai rangé ce qu’il y avait à ranger. J’ai replier convenablement la Grand Voile, examiné la déchirure et constaté que c‘était seulement les coutures qui avaient pété… J’ai tout mis bien comme il faut.
Puis je suis allé jeter un œil à l’intérieur pour voir les dégâts. Rien de grave heureusement. Juste quelques bouquins épars, la table carte trempée… J’ai tout rangé là encore, mis à sécher mes fringues… Et puis, je me suis assis devant mon ordi pour vous raconter cette histoire.

Alors, pardonnez-moi mais je ne vais pas faire le bilan de cette journée. Pas maintenant. Demain peut-être, quand ça ira mieux, quand je me serais reposé, les choses m’apparaitront plus clairement. Mais là… J’suis naze et un peu dégouté aussi. Tiens, en tapant ces derniers mots j’en ai les larmes qui me montent aux yeux. Alors on arrête, on mange et dodo !



Le 1er novembre 2010
 43° 8'2.90"N 5°45'22.87"E
Bandol

Je suis arrivé cet après midi dans le très joli port de Bandol, après une traversée sans commune mesure avec celle d’hier.
Même s’il a plu quasiment toute la journée (il pleut encore), j’ai eu droit à la clémence de Neptune. Peut-être a t’il jugé m’en avoir assez fait baver hier ?

En gros voilà comment les choses se sont passées.
Départ à 09H25 après avoir fait le plein de gasoil. Oui je sais, c’est un peu tard. Mais ce n’est pas ma faute si il y avait un gros bateau de plongée qui squattait le ponton à carburan… et j’ai du attendre qu’il se barre pour pouvoir rempli mon réservoir.
Sinon, échaudé par mon arrivée catastrophique de la veille, j’ai sollicité l’aide d’un des employé du port pour m’assister dans mes manœuvres, accostage au ponton gasoil et départ. Le type a été sympa et… m’a regardé faire. En effet, les conditions étaient idéales (vent dans le bon sens, pas de houle) et donc je n’ai pas vraiment eut besoin de lui, sauf peut-être pour me prodiguer un soutien moral. Et il s’en est très bien tiré je dois le dire.

Donc, tout se passe bien et me voilà cap au sud en direction des Iles du Levant, Porquerolles et Port-Cros. La mer est belle, dans le sens ou il n’y pas ou peu de vagues et que la houle est inférieur à un mètre. Le ciel est d’un gris… gris. Et en plus il pleut.
Bref que du bonheur si l’on compare à l’enfer d’hier.

J’avance bon train à six nœuds de moyenne (j’ai calculé après), et je me réjouis d’avoir augmenté un peu le nombre des tours. Que je vous explique : Je n’ai pas avec moi les caractéristiques de mon moteur. Logiquement celles-ci devraient m’attendre dans ma boite aux lettre à mon retour à Nice. Donc, je ne sais exactement ni la consomation de mon moteur, ni même à quel régime celui-ci doit tourner pour être le plus efficace. Normalement c’est 2500 tr/mn, mais avec ce vieux Mercedes je ne sais pas trop… Et donc en l’absence de ces informations, je suis obligé d’y aller à tâtons. Donc je tâtonne… Hier je sais que j’ai fais du 5 nœuds de moyenne en consommant 3,6 litres à l’heure, à 1600 tr/mn. Et aujourd’hui j’essaye de voir ce que ça donne en poussant un peu à 1800 tr/mn. Et effectivement je vais plus vite, et en plus je me suis apperçu que je consommais moins ! Cela veut donc dire que je me rapproche du point d’équilibre, nombre de tours/consomation.
Et demain j’essaierais avec 2000 tours.

Donc voilà, j’avançais bien. Dans la baie de Hyères je croise quelques voiliers qui, comme moi, avancent au moteur. Nous nous saluons de la main bien poliment comme il est de coutume. Puis, bientôt je distingue la Petite Passe par laquelle je dois me glisser avant que de poursuivre ma route vers le Cap Sicié. Je note l’heure de mon passage en ce lieu stratégique pour ma navigation et, comme hier, je me lance dans un long bord à l’estime, sans point de répère. Cap au 285°, et logiquement…

Et logiquement, une heure et demi plus tard, pile poil, je double le Cap Sicié. Yes !

Bon d’accord, je sais bien que si Pauline, ma monitrice de mon dernier stage Glénans me lis, elle va encore me dire que tout cela n’est pas très rigoureux… Ouais, mais n’empêche que ça marche ! Il suffit que je me fasse confiance… Et puis en plus c’est la Méditerranée ici. Je n’ai pas à tenir compte des courants et de la marée.

En plus, puisqu’il n’y avait pratiquement pas de houle, j’ai pu faire un peu de rase-cailloux au pied du cap… Et me remplir les yeux du spectacle mgnifique que représentait cette falaise au sommet perdu dans les nuages, tombant pratiquement à la verticale des flots… C’était véritablement splendide.

Quand je pense que quelques minutes plus tôt je me disais que pour l’instant mon voyage ne m’avait pas apporté de réel plaisir ! Et bien à la vue de ce spectacle grandiose, je me suis empressé de faire mon méaculpa !
En plus, je ne sais pas vous mais cette vision m’a donné comme un avant goût de Patagonie… Non ? Vous ne trouvez pas que ça y ressemble ?

Et le spectacle a continué jusqu’à mon arrivé à Bandol. Toute la côte à cet endroit est superbe, même sous la pluie. Pas trop mitée par les habitations, ou alors lorsque c’est fait, c’est harmonieux.
L’arrivé au port c’est faite comme une lettre à la poste. J’ai réglé ma nuitée. Demandé s’il y avait du wifi, on m’a dit oui mais c’est 4,50 Euros de l’heure. J’ai dis ok, allez vous faire voir… Et je suis rentré me mettre au chaud et au sec.

Et voilà !

Bon, demain la météo devrait s’améliorée encore un peu (avant qu’une nouvelle perturbation ne se présente…), et en plus ce sera ma dernière et plus courte étape avec seulement 23 milles à parcourir. Je vais donc pouvoir rallier Marseilles en quatre heures, ce qui fait que je pense traîner un peu à Bandol pour la matinée… C’est tellement joli ici ! Et puis il faut absolument que je me rachète une pipe. J’ai du laisser tomber la mienne ce matin en préparant mon départ, car je n’arrive pas à mettre la main dessus. Bon, elle commençait à partir en morceau alors…

Par contre je ne serais pas contre un peu de soleil pour m‘accompagner dans ce dernier tronçon… Vous avez ça en magasin ?

Ah oui, avant que j’oublie, comme ça a été calme j’ai eu le temps de vous concocter une petite vidéo. C’est cadeau.


Le 2 novembre 2010
43°14'40.87"N 5°21'48.94"E
Marseille, au port de la Pointe Rouge

Réveil aux aurores. Que dis-je, avant les aurores puisqu’il était 04H15 du mat’. A peine ai-je ouvert l’œil et constater l’indécence de l’heure, une pensée m’a traversé l’esprit. Et si tu partais maintenant ? Un petite nave de nuit pendant que la mer est calme, ça serait sympa !
Aussitôt, un dialogue s’engage entre mes deux principales personnalités.

-Heu… T’es sûr là ? T’as même pas préparé ta nave !
-Et alors ? Tu la bâche vite fait et on se casse ! 23 milles, c’est pas la mer à boire.
-Et Bandol ? Tu voulais voir Bandol non ? Et la pipe que tu voulais acheter ?
-On s’en fout ! On s’y arrêtera au retour à Bandol ! Et ta pipe tu pourras toujours l’acheter à Marseille. En plus t’imagines, arriver avant midi ça te permettra de ne pas sauter un repas pour une fois, et puis de faire une sieste aussi… De trouver du wifi tout ça… Et puis c’est toujours toi qui dit qu’il vaut toujours mieux tenir que courir, alors plus tôt t’arrive là-bas, mieux c’est.
-Mouais… J’suis pas sûr que…
-Mais si allez !
-Bon, je te propose un compromis. On ne va pas partir de nuit parce que ce n’est pas prudent. Ta gueule, j’ai pas fini.
On va juste partir au lever du soleil comme ça, s’il n’y a pas de nuages, on pourra en profiter.
-A quelle heure il se lève le soleil ?
-07H14.
-Ah… ce qui fait qu’on arrivera vers 11H00 ?
-Oui. Comme ça, on pourra tout faire comme tu as dis une fois arrivé à la Pointe Rouge. En plus, je vais pouvoir commencer à me renseigner pour changer la GV…
-Ah oui, c’est vrai qu’il y a ça à faire en arrivant. J’avais oublié…
-T’inquiète moi j’y pense… Bon, fout-moi la paix maintenant si tu veux que j’ai le temps de faire une nave aux petits oignons.
-Ok, j’te laisse tranquille…

07H45, le jour pointe à peine et voilà que la Boiteuse quitte le port de Bandol. Enfin, le Tom Kyle pour encore quelques jours.
Debout de bonne heure comme vous l’avez deviné, j’ai eu largement le temps de me préparer, et même de me boulotter deux pains aux chocolats tous frais avant de partir.
Comme prévu j’ai eu droit à un levé de soleil, timidounet quand même, qui c’est vite fait rattrapé par la grisaille. Mais bon, pendant un moment les rayons de soleil ont éclairé l’île de Bendor, et ça c’était pas mal.

Petite nave sympa, pas compliquée. Avec comme point d’orgue, visuel si je puis dire, le cap de l’Aigle près de la Ciotat, et le passage entre l’île du Friou et l’île de Calseraigne… Pour le premier, vous n’avez qu’à regarder la vidéo ci-après, et pour l’autre et ben… Vous n’aurez rien car j’ai été tellement secoué que je n’ai même pas pensé à prendre de photos !
J’explique: L’effet Venturi vous connaissez ? Non ? Et bien c’est une loi de la physique des fluides qui dit en gros que lorsqu’il y a compression il y a accélération. C’est valable pour tous les fluides, l’air comme l’eau. Par exemple, lorsque vous pincez l’extrêmité d’un tuyau d’arrosage que ce passe t’il ? Oui, ça accélère. Très bien au premier rang.


Et c’est donc ce qu’il s’est passé. Dans la rade de Marseille soufflait un bon 30 nœuds du Nord-ouest, du Mistral, qui en passant entre les deux îles s’est transformé en 50 et plus. Ajouté à cela une remontée subite des fonds entres les deux îles et vous obtenez des creux de deux mètres hyper-rapprochés. Bing ! Bang ! Boum ! Ca a tapé tant et plus, pile dans la ligne de foi (l’axe du bateau), que j’ai dû m’écarter un peu de ma route pour soulager le bateau et le bonhomme. Mais bon, en fin de compte j’ai réussi à passer le goulet et à rallier le port de la Pointe Rouge. Sous le soleil dois-je ajouter, ce qui veut dire que ça ne coûte vraiment rien de demander. Il était deux minutes avant midi.

J’ai passé un petit coup de VHF pour m’annoncer, et à l’invite de la Capitainerie je me suis posé juste à l’entrée du port, à cent mètre à peine de l’INPP, le centre où je dois passe mon stage.

C’est un peu loin de tout hélas. Genre cinq minutes de vélo pour aller aux gogues si vous voyez ce que je veux dire. Et pour changer, pas de connexion wifi. Par contre ce n’est pas cher : 25,85 Euros pour trois nuits. Ils m’ont fait 50% de remise d’après ce que j’ai compris… Ma bonne frimousse sans doute.
Et cerise sur le gâteau, alors que je revenais de mes formalités administratives, je me suis arrêté à une voilerie. La dame que j’ai rencontré, et à qui j’ai expliqué ce qu’il m’était arrivé, n’a pas trop su quoi me dire. La voile était t’elle récupérable ? Et si oui, à quel coup ? Allais-je être obligé d’en faire tailler une neuve ? C’est qu’une voile neuve c’est un truc à 1500 Euros…

Le mieux encore était de vérifier de visu, et cette dame fort compétente m’a donc accompagnée jusqu’au bateau pour voir ce qu’il en était. Ces premiers mots eurent le don de me soulager. « Mais c’est qu’elle est en bon état cette voile ! ». « Il suffit juste de refaire la couture, de reprendre la chute… Et elle pourra encore vous faire cinq ans ! ».
Euh… Oui, et c’est combien ?
« 70 Euros… Si vous voulez juste la reprendre, mais je vous conseille de lui faire carrément une deuxième jeunesse en reprennant toutes les coutures principales, de consolider les housses de lattes, la bordure aussi… La toile est saine, ça vaut le coup de la conserver. Pour 300 Euros, on peut vous faire ça. »
Ah ouais ? Banco !

Et voilà, je vais pouvoir repartir dans trois jours avec une voile totalement remise à neuve. Et pour bien moins cher que ce que je craignais. Content le Gwen !

Après le départ de la gentille dame, j’ai terminé le reste de paella d’hier au soir et je me suis écroulé sur ma couchette, où j’ai dormi pendant deux heures.
A mon réveil, je me suis apperçu que Denis, le vendeur de Cogolin, m’avait laissé un message… Il s’inquiétait de ne pas avoir de nouvelles depuis le Lavandou.
Hum ! J’imagine que Momo doit être vachement occupé.
Bon, demain il faut absolument que je trouve de quoi vous envoyer tout ça… C’est que ça va vous en faire de la lecture ! Douze pages !

Donc, demain matin avant de partir en cours je vais enlever la GV de son mât, et l’emmener jusqu’à la voilerie. Ensuite, et bien je vais jouer les bons élèves pendant la journée et en fin d’après-midi j’essaierais de me rendre dans le centre de Marseille. Le vieux port tout ça… Je n’y suis jamais allé, alors autant en profiter. Et puis peut-être arriverais-je enfin à trouver une pipe ?

9 commentaires:

Jack Sparrow a dit…

au moteur l'emmerdement en dehors de n'être pas appuyé par sa voile c'est le risque de désamorcer ainsi que déjauger ton hélice et de surcroit te faire secouer comme tu l'as été. Mieux vaut établir dans le port, et si tu n'es pas amarré face au vent ou dans un endroit propice essaie de trouver à t'amarrer sur l'avant à un coffre ou une pointe de ponton face au vent qui te permet de hisser tranquillement ta GV et prendre les ris que tu veux, car m^me en route au moteur dès qu'il y a de la mer faut être appuyé par la GV qui te donne de la stabilité, elle devient un précieux gouvernail aérien.
A part çà t'es arrivé c'est l'essentiel, bonne semaine...

Gildan a dit…

Pour l'instant je n'ai lu que la journée calme et vu les 2 premières vidéos...mais déjà je voyage.
Et le temps que tu as dans cette première vidéo je l'ai eu, il y a quelques années à l'endroit de la deuxième vidéo...avec mon oncle. Les voiles, le moteur, l'hélice qui je crois sortait de l'eau ...c'était épique !
Bien, je reviens demain pour lire le début et la fin !
Arrivée donc Chez moi !!!
:)

cazo a dit…

Plus il y a de ris, plus il y a d'amis !!

Je constate avec plaisir que tu n'es pas tombé du mât... car sinon nous aurions été privés de cette p'tite tranche de nave plutôt chahutée... Merci de nous faire partager ces moments, un régal !!

Tiens le cap, t'es sur la bonne route ;-) !!

Monique a dit…

L'île verte, la Ciotat...vieux souvenirs de pêche en barquasse, souvenirs de mes vacances d'ados : mal de mer, coups de soleil et premières amours sur un coin de rocher...
Je voyage aussi dans le temps.

Bon, tu t'en sors pas mal malgré quelques petites bosses...tu me fais penser à mes gamins quand ils faisaient leurs premiers pas, en titubant ...


Dis donc,très occupée, oui, mais j'ai transmis !!!

Gwendal Denis a dit…

@Jack Sparrow : J’aurais du hisser ma GV à l’abris du port, comme je l’avais pensé au départ. Cela a été mon erreur, parmi d‘autres. Cela-dit, si je m’avais écouté, je n’aurais pris qu’un ris au départ, et donc le problème se serait poser de nouveau au moment de prendre le deuxième. Enfin je crois. Je me dis aussi que c’est peut-être mieux que la voile est pété dès le départ… Que ce serait-il passé si elle avait explosé complètement plus tard alors que je tirais des bords de près ? Je ne sais pas… Mais comme tu l’as dis précédemment, c’est le métier qui rentre. Et j’apprends tous les jours.

@Gildan : Ah bon ? Tu lis dans le désordre toi ? Comme tu veux… J
Sinon oui, j’ai oublié d’en parler, mais c’est vrai qu’avec des grosses vagues courtes, l’hélice à la fâcheuse tendance à vouloir sortir de l’eau et le bateau se retrouve sans propulsion pendant quelques instants… Et s’arrête. Et c’est pas bon puisque c’est la vitesse qui lui donne de l’appui nécessaire pour franchir la vague suivante.
Donc, on est constamment en train de relancer le bateau… et le mien faisant cinq tonnes, même avec un moteur de 42 Cv, ce n’était pas évident.

@Cazo : Je ne sais pas si je suis sur la bonne route, ou même de quelle route il s’agit. Pour l’instant je la suis sans trop me poser de questions. Avec le recul, je m’aperçois qu’à aucun moment lors de cet épisode je n’ai pensé à faire demi-tour… J’avance, même si j’en prends plein la gueule, et j’avoue que ce côté pugnace est assez nouveau pour moi.

@Monique : Excuse-moi Maman-Momo, tu as été parfaite et je suis une mauvaise langue mal informée ! Merci à toi pour ce relais attentif.
Alors comme ça on a vécu ses premiers émois sur la côte près de la Ciotat ? Ravis de t’avoir replongé dans cette période préhistorique ! Arf !
Je m’en sors pas mal comme tu dis… Et avec du bol, j’en ai conscience. Je suis en train de faire un bilan de cette aventure, et je vais en tirer certains enseignements que j’appliquerais dorénavant. En tous cas j’essaierais.

Pascal a dit…

Bravo Gwendal pour cette survie dans le mauvais temps. Tu profitera encore mieux d'un bon Force 5.

Le principal pour l'instant c'est de faire les "erreurs" sans casser ni le bateau, ni le bonhomme. Comme tu as conscience de "tes petites erreurs" tout va bien.

En tant qu'ancien collègue de Sereine je te souhaite un bon stage de survie.

Gwendal Denis a dit…

@Pascal : Salut et merci pour le bravo même si je ne sais pas trop si je le mérite.
Tu résumes bien le truc, le tout est d'apprendre sans rien casser. Ou rien de grave en tous cas.
J'attaque les cours dans 1H30, mais avant ça j'ai ma GV à descendre... et à plier !

cacahuette83 a dit…

et bien moi, vu mon inculture dans la navigation, je me contenterai d'un commentaire touristique.... Merci de ce beau reportage que tu nous fais, j'ai souffert avec toi en te lisant et vécu tes joies de réussites! Bravo à toi! Tu as déjà essuyé pas mal pour une première sortie!

Sinon, tu nous as pas dit, as-tu fini par trouver ta pipe? Tout de même domage après avoir quitter Cogolin, pays de la pipe!

Bon aller, bon stage et gros bisous version xxl de notre part à tous!

Gwendal Denis a dit…

@Cacahuette : J’apprends tous les jours. Parfois c’est à coups de pompes dans le cul, comme dimanche. Parfois c’est, heureusement plus agréable comme enseignement.

Sinon, toujours pas de pipe à l’horizon… Je pense que demain j’irais faire un tour du côté du vieux port. M’étonnerais que je n’y trouve pas mon bonheur.