vendredi 6 mai 2011

Vinaròs, Castellon, requin et poisson lune

Le mercredi 04 Mai 2011

40°27.846N 00°28.488E
Vinaròs

Vinaròs
Si j’avais à vous décrire Vinaròs, je n’emploierais hélas, que des termes peu élogieux. C’est une ville qui représente tout ce que je déteste. Uniquement tournée vers le tourisme des classes moyennes, cette ville a poussée comme un champignon vénéneux à la fin des années 90 et est devenue, comment dire, l’exemple même du mauvais goût. Architecturalement c’est une horreur. Dans le centre on a l’impression de se balader dans une ville de banlieue qui aurait été conçue par les mêmes cerveaux malades qui on construit certaines des villes de la grande couronne parisienne. Ou encore Villeurbanne. Tien oui, voilà à quoi Vinaròs me fait penser, à Villeurbanne. Et croyez-moi, dans mon échelle de valeur il ne s’agit pas d’une référence (Désolé mon Patou !).

En fait, Vinaròs est l’exemple type de l’impact de la crise économique actuelle. Celle-ci est le produit d’une spéculation immobilière effrénée tournée vers un tourisme de masse, qui se retrouve une fois la bulle éclatée dans une merde noire... Partout des chantiers à l’abandon, des panneaux se alquila ou se vende aux fenêtres de tous les immeubles et d’un magasin sur deux, bref cette ville est en faillite.

Brrrr....
J’ai discuté un peu avec la serveuse du club nautique (oui j’ai un bon contact avec les serveuses...), une émigrée roumaine depuis dix ans en Espagne, et celle-ci m’a un peu décrit son ressenti par rapport à cette crise. Avant, la ville ne désemplissait pas d’avril à octobre. Des touristes partout, issus pour la plupart de la classe moyenne, qui achetaient ou louaient des appartements à des prix très attractifs et consommaient comme des forcenés.
Et depuis 2008, c’est la misère. Les grouillots de base ne peuvent plus se payer le rêve espagnol et restent dans leur pays. Et lorsqu’ils viennent quand même, ils ne restent que quelques jours, achètent leur bouffe chez Lidl et mangent le soir à la maison... D’ailleurs si l’on observe bien, le port qui est sensément plein à craquer de yachts étrangers n’abrite plus que quelques unités battant pavillon espagnol. Et une bonne partie d’entre eux sont à vendre.

En 15 mn à pied, j'ai fait le tour d'un pâté de maison...


Je suis partagé lorsque je regarde Vinaròs. Partagé entre ma compassion naturelle qui me pousserait à plaindre ces gens qui ne peuvent plus vivre correctement, et une envie de leur crier au visage : « C’est bien fait pour vous, vous n’aviez qu’à pas écouter les sirènes du Capitalisme ! ».
Mais par delà cette dualité, je ne peux m’empêcher de me dire que tout cela est un énorme gâchis.

Ces considérations faites, vous comprenez que je ne me suis pas attardé dans cette ville. En plus j’avais mal à ma cheville…

Le matin de ce mercredi un mécano est venu jeter un œil à la Boiteuse muni de son voltmètre. En deux coups de cuillère à pot, il a repéré un fil qui se baladait un peu seul à son goût, et après l’avoir rebranché nous avons pu constater que tout semblait fonctionner de nouveau correctement…
Grrr…. Voilà un truc qui m’énerve. Parce que si j’avais été un poil plus doué en mécanique, je m’en serais aperçu de ce maudit fil débranché ! Et j’aurais économisé 20 € par la même occasion.

Mais bon, j’en ai encore appris un peu plus sur le fonctionnement interne de la Boiteuse, et c’est bien ça que je préfère retenir.

Bientôt !
L’après-midi, grosse sieste de trois heures et en fin de journée papotage sur le net où j’ai également tenté de faire avancer mon dossier d’assurance pour le bateau… Celui-ci n’avance pas et il a fallut que je hausse légèrement le ton pour faire accélérer tout ça. Il y a encore quelques petites choses qui coincent, mais je ne désespère pas d’arriver un jour à avoir un certificat à présenter aux autorités portuaires !

Le soir, j’ai eu beaucoup de mal à m’endormir… J’avoue que toutes ces tracasseries et la baisse de moral qu’elles induisent ont continué à me travailler le cervelet, et à chaque fois que j’essayais de trouver le sommeil mes pensées virevoltaient en tous sens et pas toujours dans des directions agréables.
Alors pour éviter de penser j’ai lu. J’ai terminé le Cimetière de Prague et vers deux heures du matin j’ai enfin pu m’endormir…

Le jeudi 05 Mai 2011

39°58.220N 00°01.013E
Castellon

Réveil aux aurores après une nuit extrêmement courte. Moins de quatre heures de dodo, c’est pas bon que je me suis dit… Vivement que j’arrive à Valencia et que je puisse me reposer tout mon saoul.

Euh... J'me sens toute petite !
J’ai largué les amarres assez tard, vers 09H30, direction le poste à carburants. Là, j’ai poireauté pendant une heure à un quai un peu trop haut à mon goût avant qu’un employé daigne bien vouloir me faire le plein. Mais bon, no stress ; Je n’ai que 36 milles à faire aujourd’hui alors je peux bien me permettre de trainer un peu.
Et à 10H30 je suis parti de Vinaròs.

Petite nave tranquille je dirais. Je suis passé au plus près de la charmante ville de Peñiscola perchée sur son promontoire rocheux (là où j’avais prévu au départ de faire escale…) avec ses maisons blanches et son château. Splendide.
La vue de cette blancheur m’a remis du baume au cœur… Le blanc des maisons, ça veut dire le Sud. Le Sud et sa chaleur, le Sud et ses mystères… Bref, le Sud, c’est là où je veux aller.
D’ailleurs, j’ai passé pour la première fois depuis bien des milles, la journée en short et en teeshirt et j’ai troqué mon bonnet contre mon chapeau de brousse ! Là encore, les délices de la photothérapie ont eut le don de me remonter le moral.

Peñiscola la belle !
J’ai pu observer quelques thons qui sautaient hors de l’eau, mais aucun n’a daigné mordre à l’hameçon qui désormais traine en permanence derrière la Boiteuse (j’en aurais un, un jour !). A un moment, alors que défilait sous mes yeux les délices urbains (beurk !) de la Costa Del Azahar j’ai vu le cadavre d’un requin qui flottait à quelques brasses de là. Un petit requin de moins d’un mètre, plutôt sombre avec le nez pointu. Un requin bleu sans doute.

Et en milieu d’après-midi j’ai fait la rencontre la plus improbable depuis mon départ. Sur bâbord avant j’aperçois ce que je prends pour une grosse méduse flottant sur l’eau. En la dépassant (j’étais à 4 nœuds) je me rends compte qu’il s’agit en fait d’un Poisson Lune, ou Môle, de plus d’un mètre d’envergure !

Un poisson lune qui fait la sieste
Aussitôt, je ne sais pas ce qu’il m’a pris, j’ai viré de bord, mis à la cape et je me suis laissé dériver vers lui. Je le croyais mort, mais non il était tout simplement sur le ventre à prendre le soleil. Lorsque je l’ai quasiment frôlé (manœuvre HLM parfaite entre parenthèse) je me suis retrouvé comme un con ne sachant quoi faire. J’hésitais entre prendre la gaffe et le remonter (comment j’aurais fait, ça pèse un âne mort ces poissons-là), ou prendre mon appareil photo et immortaliser cet instant. Hélas mon hésitation me l’a fait dépasser… Et puis j’avais un peu de mal avec l’écoute de Génois dans une main, celle de GV dans l’autre et la barre entre les jambes ! Je l’ai vu se redresser paresseusement, puis plonger et disparaitre dans le bleu. Trop tard.

C’était magnifique.

Barre toi d'là !
Quelques heures plus tard j’arrivais au port de Castellon. Un port immense essentiellement industriel (encore), où j’ai dû me disputer le passage de l’entrée avec un énorme pétrolier. Bon, j’ai été sympa je lui ai laissé la priorité… Mais le prochain que je rencontre je ne serais peut-être pas aussi gentil !

Sur place, alors que je me rendais au supermarché du coin pour faire quelques emplettes (j’avais envie de frais) j’ai fais la connaissance d’un couple de Français, Christian et Cathie, qui vivent ici depuis presque un an avec leur fils Laurent. Ils habitent sur leur bateau, le Harmonie I.
Ils m’ont invité pour l’apéro et nous avons discuté jusqu’à tard le soir (pour moi en tous cas, rappelez-vous que j’avais très peu dormi la veille). Mais malgré ma fatigue j’avoue que cette rencontre m’a procurée énormément de plaisir… Dommage qu’il me faille repartir, mais la route n’attend pas. Demain soir je serais à Valencia le but que je me suis fixé pour cette semaine de navigation… J’y suis presque !

5 commentaires:

Monique a dit…

Un poisson lune qui se fait dorer au soleil: belle image poétique!

Pas de regrets pour Péniscola ?

cazo a dit…

Que c'était bon de partager ce petit voyage... le contraste des lieux et les sentiments qu'ils inspirent... les rencontres impromptues... les clichés qui vont avec et qui transportent(abstraction faite du cliché clin d'oeil à tsuki... je ne suis pas dupe !! ;-) !!).

Il semblerait que La Boîteuse et toi , ça y est, vous n'êtes plus qu'un ... La batterie s'était déchargée mais tout cela ne tenait qu'à un fil...

;-)

Merci francky !!

Gwendal Denis a dit…

@Monique : Si, quand même un peu. Mais c’est pas grave, je suis sûr que j’en croiserais d’autres de belles petites villes toutes blanches !

@Cazo : Pour les clichés j’assume tous les miens ! Sauf pour la photo du Mola mola (qui s’appelait sans doute Omar mais qui n’en était pas un, de homard !) que j’ai dû emprunter sur le net, because je n’ai pas été assez rapide pour saisir ce monstre avant qu’il ne disparaisse…

Lucifer ! a dit…

Il me semble avoir vu un bateau nommé Harmonie sur le ponton de Séte ;Est-ce de celui-là dont tu parles ou me serais-je trompée ?

Gwendal Denis a dit…

@Lucifer : Non, je ne pense pas car cette famille est à Vinaros depuis six mois.
Cela-dit, il doit y avoir beaucoup d'Harmonies dans les ports. Le nom s'y prête facilement.
Par contre la Boiteuse je suis sûr qu'il n'y en a qu'une !